Catherine Moureaux (40 ans) est tête de liste à Molenbeek pour le Parti socialiste aux élections communales du 14 octobre. En tant que maître d’enseignement à l’Ecole de santé publique de l’ULB, le médecin généraliste de formation a eu l’occasion d’analyser la pénurie de généralistes bruxellois et le forfait des maisons médicales. D’autres dossiers lui tiennent à coeur : le soutien à la première ligne, la qualité de la prise en charge en maison de repos, l’accessibilité pour les personnes à mobilité réduite… « La santé est souvent fort négligée au niveau communal tant dans les déclarations politiques que dans les bilans », regrette Catherine Moureaux. « Or, la commune peut presque tout faire. Elle a beaucoup de leviers pour activer des politiques de santé à condition de s’en saisir. Ce n’est pas du normatif mais du terrain et de la pratique. Il faut mettre les mains dans le cambouis pour améliorer la santé des gens. » La candidate bourgmestre estime que le niveau communal doit soutenir le réseau des professionnels de soins, entre autres dans ses relations avec le CPAS. « Il faut pouvoir assurer aux personnes les plus précarisés une bonne collaboration entre le pôle social (le CPAS) et le pôle santé (la première ligne). Aujourd’hui, cette communication n’est pas toujours aisée à Molenbeek. Nous préconisons la création d’une ligne téléphonique directe ou la désignation d’un agent communal qui soit dédié à la relation à la bonne communication avec les professionnels de la santé. » L’enseignante en santé publique est convaincue qu’au niveau communal il est tout à fait possible de viserla santé dans toutes les politiques (le fameux HiAP anglo-saxon) et de faire de la promotion de la santé. Les écoles communales peuvent être un vecteur de promotion et de prévention de la santé mais Catherine Moureaux considère que ce circuit présente « des avantages majeurs et des inconvénients redoutables « . Donc à manier avec précaution. A la limite de la pénurie Le Dr Moureaux considère que la commune de Molenbeek est à la limite d’une situation de surcharge de travail pour les généralistes de la commune mais que la majorité des MG sont tout à fait accessibles aux Molenbeekois. » Il y a une barrière financière à l’entrée aux soins, mais je ne ressens pas, au contact de mes citoyens, qu’il a un problème de pénurie médicale. Il est par contre plus difficile d’obtenir que les soignants se déplacent à domicile ou de les voir rapidement parce qu’il y a une surcharge de travail. » Récemment une nouvelle maison médicale s’est ouverte dans le centre historique de la commune. » Elle est l’embryon du premier centre intégré de Bruxelles « , explique Catherine Moureaux, » regroupant plusieurs associations (l’asbl Lama, l’asbl D’ici et d’ailleurs…) La commune doit mettre l’infrastructure à disposition de ce projet extrêmement novateur. Ce support permettrait de remettre la première ligne au centre du système. » La tête de liste socialiste rappelle que Molenbeek n’est pas actionnaire d’un hôpital et que les habitants doivent se rendre dans les autres communes pour être hospitalisés. » Les services de garde de médecine générale actifs à Molenbeek permettent aux patients de ne pas devoir se rendre exclusivement aux urgences hospitalières. » La député bruxelloise se défend de vouloir privilégier les maisons médicales – même si elle a personnellement travaillé dans ce type de structures pendant des années. « Ma proposition d’améliorer la coordination entre les soignants et le CPAS concerne principalement les médecins isolés, qui ont encore plus besoin de ces services que les maisons médicales qui elles peuvent faire appel à du personnel administratif interne pour connaître le statut social d’un patient ou lancer un signal d’appel par rapport à des problèmes de facture, de logement…. « Le Dr Moureaux estime que la commune doit aiguiller les patients vers la première ligne de soins. « Les soignants doivent se sentir soutenus et valorisés par la personne en charge de la santé au niveau communal. S’ils peuvent mieux s’organiser, les files d’attente seront moins longues et les patients se tourneront davantage vers la première ligne. La commune doit également faire la publicité de la première ligne en organisant des campagnes de promotion auprès des citoyens, entre autres, lors des permanences sociales. Il faut aussi, au niveau fédéral, se battre au niveau des coûts des soins : instaurer les tiers payant automatique, réduire le ticket modérateur tout en valorisant l’honoraire… Trop de patients vont encore aux urgences parce qu’ils pensent, à tort, qu’ils ne recevront pas la facture. « La candidate pointe un autre grand problème à Molenbeek, celui de la mobilité. « De nombreux intervenants ont déjà trouvé des solutions : se déplacer à vélo ou à pied, réduire le nombre de visites à domicile… Le problème est plus aigu dans le centre historique et le soir. La commune doit faire davantage de publicité pour le système qui permet aux soignants de stationner devant les garages. Il est très peu utilisé à Molenbeek. Il faut organiser une campagne de sensibilisation des habitants pour leur faire connaître et utiliser ce dispositif. C’est important pour les personnes âgées, nombreuses dans notre commune, qui ont souvent besoin de soins à domicile. « Réintroduire la police de proximité Quant aux problèmes de sécurité, la candidate bourgmestre estime que les pharmaciens sont davantage concernés par cette problématique que les médecins. « Certains pharmaciens ont carrément décidé de quitter leur officine en raison de l’insécurité et de s’installer ailleurs. Il faut pouvoir utiliser les caméras installées à proximité des pharmacies pour pouvoir les surveiller. Nous nous sommes battus pour cela durant cette législature. C’est capital pour réassurer ces professionnels. Nous devons aussi redévelopper une police de proximité. La majorité actuelle, menée par Françoise Schepmans (MR), a raté une occasion, lors de la négociation du Plan canal avec le ministre de l’Intérieur, Jan Jambon. La commune a reçu des policiers supplémentaires mais a accepté des missions supplémentaires. Ce plan est une fausse bonne nouvelle pour Molenbeek. Il a empiété sur les capacités en police de proximité. Il faut plaider pour le retour de la police de
Le Gouvernement fédéral met en péril le projet bruxellois Dionysos de soutien des personnes âgées fragilisées
Le 18 avril dernier 2018 j’ai interrogé le Ministre bruxellois de la santé sur « le projet Dionysos en péril ». Compte-rendu ci-dessous: Mme Catherine Moureaux: Le projet Dionysos est une initiative du service de santé mentale Rivage-den-Zaet. Il est agréé par la Commission communautaire commune (Cocom) et financé par l’Institut national d’assurance maladieinvalidité (Inami) dans le cadre du protocole 3 « Alternatives de soins visant le maintien des personnes âgées à domicile ». Ce projet est constitué d’une unité mobile de soutien au réseau de soins de personnes âgées et fragiles de plus de 60 ans. C’est donc un réseau de deuxième ligne. À partir d’une écoute professionnelle et de la mise en place d’un travail de concertation, Dionysos entend mobiliser les ressources et les compétences du réseau, tant formel qu’informel, afin de renforcer celles du patient et lui permettre de maintenir son lieu de vie au domicile. L’équipe travaille sur les cas lourds, les cas complexes, impliquant notamment des refus de soins, dans lesquels la famille et/ou l’équipe de soins a besoin de soutien pour améliorer l’avenir de la personne âgée fragilisée. Il s’agit d’une approche tout à fait novatrice, qui s’articule aujourd’hui parfaitement avec les autres formes de soutien aux personnes âgées au domicile, à savoir les équipes de soins primaires et le travail des centres de coordination des soins. Aujourd’hui, cette équipe de professionnels engagée activement sur le terrain depuis huit ans s’est mise en vente sur les réseaux sociaux, en précisant sa disponibilité au 1er juin 2018. J’ai été particulièrement interpellée par cette façon de témoigner de leurs difficultés actuelles. Pourquoi une telle démarche ? Parce que, alors même que l’évaluation de ce projet a mis en avant une meilleure utilisation des soins de santé, un moindre recours aux services des urgences, une diminution des cas de dépression, une meilleure utilisation des soins de première ligne, une meilleure adaptation à l’intégration au sein d’une maison de repos, son financement semble être mis en péril par les décisions du pouvoir fédéral, au motif que l’objectif de retarder l’institutionnalisation n’est pas atteint. La ministre De Block ne souhaite pas prolonger le projet et renvoie à l’Inami en vue de son intégration au budget classique de l’assurance maladie. Or c’est un projet novateur. Les protocoles 3 avaient précisément pour objectif de détecter des projets novateurs. Le projet novateur dont il est question ne rentre donc pas dans les cases actuelles. Il serait suggéré aujourd’hui de passer d’un financement forfaitaire à un financement à l’acte. Cette méthode soulève de très nombreuses questions, la première étant que la notion d’acte ne correspond absolument pas au type de travail de supervision effectué. Dans cette situation, la politique fédérale de santé semble, une fois de plus, centrée davantage sur une volonté de réaliser des économies que sur l’intérêt et le bien-être du patient. Dans une équation tout à fait cynique, il semble que le gouvernement fédéral ne voie plus grand intérêt à investir, dans le cadre du protocole 3, dans des projets qui, in fine, participent réellement à l’amélioration de la prise en charge et diminuent les coûts de la politique régionale d’Aide aux personnes. C’est tout à fait cynique car ces mesures fédérales ne feront que dégrader les capacités de la Région à répondre à ses besoins en matière d’aide aux personnes. Quels contacts avez-vous avec les autorités fédérales au sujet de ce projet ? Quelles mesures ou actions avez-vous engagées afin de pérenniser ce projet ? Avez-vous envisagé d’autres options au niveau régional, si aucune solution n’était trouvée en concertation avec l’État fédéral ? Comment réagissent les autres cabinets lors des réunions intercabinets ? Merci, M. le ministre . M. Le Ministre, Didier Gosuin: Pour rappel, les projets dits « Protocole 3 » concernent des projets de soins et de soutien aux soins pour les personnes âgées et fragiles. Deux appels à projets avaient été lancés en 2010 et 2014 par l’Institut national d’assurance maladie-invalidité (Inami), avec pour objectif de retarder l’institutionnalisation des personnes âgées et de garantir un maintien à domicile dans les meilleures conditions possibles. Quelque 67 projets au niveau belge avaient été retenus au départ. Il en reste aujourd’hui 37, dont deux à Bruxelles, et essentiellement un, à savoir le projet « Dionysos ». Les projets s’articulent autour de l’offre de soutien psychologique, de soins de nuit, d’ergothérapie, de « case management » (processus coopératif interprofessionnel et interinstitutionnel) et de soins en centre de jour. Les projets ont fait l’objet d’un accompagnement scientifique par un consortium universitaire qui a présenté les résultats de son étude scientifique en octobre 2017. En résumé, on peut en conclure que l’objectif qui consiste à maintenir les personnes âgées plus longtemps à domicile n’a pas été atteint. Par contre, les conditions qui entourent l’institutionnalisation ont largement évolué. Si les objectifs n’ont pas été atteints sur l’aspect quantitatif, des avancées ont, en revanche, été engrangées sur le plan qualitatif. S’agissant du projet bruxellois « Dionysos », je confirme que l’évaluation de ce projet met en avant une meilleure coordination des soins, une concertation professionnelle entre les acteurs de l’aide et des soins, un moindre recours aux urgences et, sans nul doute, une meilleure adaptation à l’intégration en milieu résidentiel. À la suite de la présentation des résultats de l’étude scientifique, et devant l’impossibilité de justifier le déploiement des projets sur l’ensemble du territoire, l’autorité fédérale avait, dans un premier temps, estimé qu’il ne convenait pas de prolonger les projets au-delà de juin 2018. Après de nombreux échanges intercabinets dans le cadre du groupe de travail « Maladies chroniques », nous sommes parvenus à convaincre les autorités fédérales de maintenir les financements actuels pour les projets qui présentent une réelle valeur ajoutée. Il s’agit, pour 2018, d’un budget équivalent à 12,2 millions d’euros pour l’ensemble des projets menés en Belgique. La Flandre et la Wallonie se taillent ici la part du lion, car seul un petit million d’euros nous est réservé. Un groupe de travail spécifique composé des organismes assureurs, des représentants des administrations fédérales, régionales et communautaires et des prestataires se réunit régulièrement depuis janvier dernier
Plus d’une centaine de médecins francophones perdus chaque année – Lalibre 01/02/2018
Selon Catherine Moureaux (PS), la clé de répartition des numéros Inami est à l’avantage des néerlandophones. Si on ne peut pas encore parler d’une pénurie des médecins généralistes à Bruxelles, le manque de médecins dans certains quartiers est, lui, bien avéré et une pénurie dans les prochaines années serait même à prévoir. Et la clé de répartition attribuant les numéros Inami à Bruxelles ne risque pas d’arranger la situation. « Je ne dirais pas qu’il y a une pénurie de médecins généralistes à Bruxelles pour le moment mais il y a clairement des quartiers où il manque de médecins. En plus, le vieillissement se fait sentir dans la profession et cela va poser problème dans les années à venir », explique Catherine Moureaux, cheffe de groupe PS au parlement bruxellois. Des quartiers en mauvaise posture D’après le cabinet du ministre de la Santé, Didier Gosuin (Défi), 30,2 % des médecins généralistes à Bruxelles ont entre 55 et 64 ans. La situation est même pire à Molenbeek et à Schaerbeek où la moitié des médecins ont plus de 50 ans. A Uccle, ce taux atteint même 80 %. En Flandre et en Wallonie, le nombre de médecins est calculé sur base du nombre d’habitants. A Bruxelles, le critère pris en compte est le nombre d’élèves inscrits dans les écoles de primaire et de secondaire. « Pourtant, on sait que de nombreux francophones font leur scolarité en néerlandais, donc forcément les résultats sont biaisés », explique Catherine Moureaux. Selon ses calculs, cela signifie que, chaque année, 107 médecins sont pris du quota francophone. Pour elle, il faudrait prendre une autre clé de répartition objective, comme les déclarations fiscales, par exemple. « Nous savons que les personnes qui remplissent leur déclaration en français sont des francophones, donc le calcul serait plus juste », estime-t-elle. Rencontres prévues avec les médecins Pour anticiper une future pénurie de médecins, le ministre a d’ailleurs développé les aides Impulseo existantes sur le territoire de la Région. Et une vaste étude a été réalisée pour cartographier la densité des médecins dans les différents quartiers de la capitale. « Nous savons qu’il va manquer des médecins dans les prochaines années. Mais l’étude va plus loin en analysant les quartiers où ceux-ci sont le moins présents », explique Didier Gosuin. Les chiffres sont connus depuis la fin de l’année mais des rencontres sont encore prévues avec des médecins, des structures d’appui (Impulseo) ou encore des centres de formation afin de pouvoir présenter des résultats au mois d’avril. « Nous allons ainsi pouvoir mettre en place des modèles pour encourager l’installation des jeunes médecins dans des quartiers ciblés », indique le ministre. H. G. Article paru dans Lalibre du 01/02/2018