Article paru dans l’Echo du 05/06/2018: Catherine Moureaux: « La population, et en particulier celle d’origine maghrébine, vit une stigmatisation accrue. C’est terrible » Catherine Moureaux se donne pour objectif, lors des prochaines élections, de renouveler les scores du PS pour qu’il demeure « le premier parti de Molenbeek ». Catherine Moureaux part « combative et sereine » à l’assaut du pouvoir à Molenbeek-Saint-Jean, commune que son père a longtemps dirigée avant d’être renversé en 2012 par une alliance MR, cdH, Ecolo. Sa fille, qui n’habite la commune que depuis deux ans et demi, assure y avoir trouvé un « bel accueil » et se donne pour objectif de renouveler les scores du PS pour qu’il demeure « le premier parti de Molenbeek« . Malgré les sorties d’Ecolo et du cdH appelant à reconduire la majorité sortante et la frilosité du MR à s’associer à elle, la tête de liste estime que « rien n’est écrit » avant les élections d’octobre et compte bien briser une majorité « créée pour faire de l’anti-Moureaux et de l’anti-PS« . L’Echo a voulu la sonder sur quelques enjeux sociétaux rencontrés dans sa commune meurtrie par les attentats de Paris et de Bruxelles. Molenbeek a-t-elle changé depuis 2012? La commune était déjà stigmatisée, elle se relevait petit à petit et les attentats l’ont mise à genoux. La population, et en particulier celle d’origine maghrébine, vit une stigmatisation accrue. C’est terrible. À mon sens, le pouvoir en place ne s’est pas suffisamment élevé contre l’idée qu’il s’agissait d’un problème communal. Ce n’est pas un problème communal. Nous avons été désignés comme bouc émissaire, comme Bruxelles et la Belgique par la suite. Tout le monde s’est défoulé sur Molenbeek. Cela a été possible grâce à la grande faiblesse du pouvoir en place. Qu’auriez-vous fait? J’avais proposé une union citoyenne et communale, avec tous les partis politiques pour faire front avec la population dans son ensemble. Il a fallu une semaine à la bourgmestre (la MR Françoise Schepmans, NDLR) pour décliner. Elle a voulu rester dans une logique majorité contre opposition. Qu’est-ce qui vous différencierait de votre père en termes de gestion publique? Nous avons 40 ans d’écart. Cela veut dire que nous n’avons pas vécu dans le même monde. Dans les pratiques, nous sommes différents. Je viens de l’autogestion dans une maison médicale où j’ai travaillé dix ans. C’est un mode de travail sans hiérarchie, j’ai un bagage plus proche de la participation citoyenne que d’une hiérarchie à la soviétique ou à l’ancienne. Nous partageons le même ADN politique, des valeurs, des idées force, mais la manière de pratiquer la politique n’est plus la même. Je ne suis pas mon père. Depuis les attentats, votre regard a-t-il changé sur l’islam à Bruxelles? Non. Parler de l’islam et des musulmans comme d’un bloc n’a aucun sens et c’est très dangereux. Si on parle de quelque chose de manière insensée, les solutions qui en ressortent ne seront forcément pas adaptées. Nous venons d’une tradition judéo-chrétienne avec une religion très structurée. L’islam ne fonctionne pas comme cela. Il y a autant d’islams que de musulmans. Il y a plusieurs communautés, plusieurs islams. Je m’inquiète pour certains jeunes qui trouvent du réconfort dans une pratique rigoriste de l’islam. Constatez-vous le développement d’un conservatisme dans la communauté musulmane de Bruxelles? Je m’inquiète pour certains jeunes. J’ai quelques témoignages selon lesquels certains trouvent dans des pratiques rigoristes, ce qui ne signifie pas radicalisme violent, un réconfort. C’est peut-être un signal de conservatisme. Mais à l’inverse, il y a une très grande volonté de la communauté d’origine maghrébine et de culture musulmane de s’ouvrir, de montrer ce que sont les islams, les musulmans. Je ressens davantage ce mouvement-là qu’un mouvement de conservatisme amplifié. Un rapport de l’Ocam pointe la diffusion de manuels appelant au meurtre, à l’homophobie et à l’antisémitisme, ce qui fait craindre que ces idées traversent la communauté musulmane. C’est profondément choquant. Ces manuels, cela ne peut pas exister, des mesures ont été prises. C’est un travail pour nos services de sûreté comme celui de contrôler ce qui se passe dans les mosquées. Sur le terrain communal, la question du rôle des mosquées est importante. Il y a beaucoup de mosquées à Molenbeek, parfois reconnues, parfois pas, c’est un tissu qui n’est pas homogène. Ce sont des lieux de socialisation dont les gestionnaires doivent être respectés, ce qui implique un dialogue. On a pu reprocher à mon père d’être proche des mosquées mais on reprochera à Madame Schepmans de ne rien avoir su de ce qui s’est passé. Il faut du dialogue, mais le rôle de fliquer les mosquées n’est pas celui de la commune. Mais si vous décelez des problèmes vous devez bien les signaler… Bien sûr. C’est évident. Un certain nombre de jeunes sont attirés par le radicalisme. Comment l’empêcher? Les événements de Liège ont montré que la prison joue un rôle dramatique dans le parcours de certains qui glissent du banditisme, du rejet de la société vers ce radicalisme violent. Nous avons un devoir d’éviter à nos jeunes d’aller en prison et lorsqu’ils y vont, de leur fournir un avenir. Abaoud, qui a inspiré les frères Abdeslam, a été radicalisé en prison. Abrini, Merah, Nemmouche et les frères El Bakraoui sont passés par la case prison. On retombe sur la question de savoir pourquoi il y a plus de personnes des quartiers plus sensibles en prison. Il y a aussi des influences étrangères… D’où la nécessité d’avoir un bon dialogue, du respect et de pouvoir travailler sur la question du financement des cultes. Quand on fait face à une puissance financière comme l’Arabie ou le Qatar, il ne faut pas vous faire un dessin… nous n’avons pas de puits de pétrole. Lorsqu’on n’est pas respecté, on ne dit pas non à une manne financière qui vient de l’étranger. Le voile est compatible avec l’égalité homme-femme. Constatez-vous une augmentation du port du voile à Molenbeek et ailleurs? À nouveau, on ne parle pas d’un bloc mais de personnes différentes. À parler sans nuance, on enferme les gens dans le
Bon 1er mai camarades ! Mon discours – 1 mai 2017
Chers camarades, Cette veille de premier mai est une journée particulière pour nous qui sommes attachés à la fête du travail, à la symbolique dont elle est chargée, à l’héroïsme qu’elle commémore et aux perspectives de luttes qu’elle impulse. Oui, chers camarades, si nous sommes toujours aussi déterminés que d’habitude à fêter le travail, il faut bien reconnaître que cette année la fête se déroule dans un climat morose. Il y a d’abord les nouvelles inquiétantes qui nous viennent de France. La candidate du Front National est plus proche que jamais de l’Élysée. Le 7 mai, la patrie des droits de l’homme, le pays des lumières, la République d’Hugo et de Jaurès sera peut-être aux mains des nostalgiques de Pétain et de l’Algérie Française. Comment on est-on arrivé là? Les responsabilités quant à la résistible ascension de Marine Le Pen sont partagées. 1/ La banalisation de son discours a fini par banaliser sa candidature. Les médias et la droite sont largement coupables de ce côté-là. A force de faire du Le Pen light, la droite a été avalée par la bête immonde, balayée du second tour. 2/ On peut se faire plaisir en disant du mal des autres mais il faut savoir reconnaître nos torts. L’action de notre famille politique n’a pas été à la hauteur lors du quinquennat finissant. Notre déception aujourd’hui est malheureusement à la hauteur de nos espérances de 2012 avec l’élection du Président sortant. Il a honteusement voulu la déchéance de nationalité. Il nous aura fait subir la honte de la déchéance électorale. Il est arrivé en disant que son ennemi était la finance. Il part en nous la laissant comme seule alternative ! Cependant, camarades, même si cela ne nous enthousiasme pas, il est important qu’Emmanuel Macron soit élu, car le 7 mai le vote Macron sera, quoiqu’en disent certains, un vote anti-fasciste. Et, pour nous, camarades, la lutte anti-fasciste primera toujours sur les éructations anti-systèmes. C’est aussi cela qui nous différencie des populistes ! Ensuite, plus près de nous à Liège, certains ont commis une double faute qui jette l’opprobre sur notre parti et nos valeurs. Double faute d’abord parce qu’alors que les conditions de vie de nombre de nos concitoyens se détériorent, des représentants politiques ont détourné de l’argent public à leur profit. Si d’autres partis sont impliqués, ceux qui ont organisé le système étaient PS. Leur absence d’éthique et leur arrogance sont incompatibles avec nos valeurs et ils sont désormais fort logiquement exclus. Ce n’est pas le cas de leurs complices d’autres partis, et cela, il faut également le rappeler, chers camarades ! Double faute enfin parce que les honteux agissements de Gilles, Moreau et consorts ont durablement abimé l’image de l’initiative publique au niveau économique. Cela est particulièrement grave dans une société où les libéraux exigent, depuis des décennies, le démantèlement de l’Etat –et où ils sont, plus que jamais, sur le point d’y parvenir avec l’appui de leurs comparses flamingants ! Car confier toute entreprise au privé en pensant que cela sera meilleur pour l’intérêt des gens reste pour moi une illusion folle. Que croyez-vous qu’il se passe dans le calme calfeutré des bureaux des CEO des grandes firmes ? Croyez-vous que l’intérêt général y est ne fût-ce qu’évoqué ? Je sais que ce n’est pas le cas. J’en veux pour preuve accablante les dizaines d’années d’impunité des dirigeants du tabac et des dirigeants de l’amiante. J’en veux pour preuve les inégalités montant en flèche dans tous les pays où les privatisations sont terminées. Nous devons défendre l’action publique de toutes nos forces, camarades ! Nous ne pouvons abandonner toute activité lucrative au privé et laisser cantonner l’action publique aux lambeaux d’un système de solidarité et de justice qui n’aurait plus que pour seuls bénéficiaires les plus faibles de nos sociétés. C’est le mouvement impulsé aussi dans le domaine de la sécurité sociale, je pense ici à l’essor toujours plus grand des assurances-groupes et des assurances privées, je pense ici aux coupes sombres dans notre budget des soins de santé, qui vont pousser tendancieusement une partie de plus en plus grande de notre population vers des assurances privées. C’est un mouvement de fin des solidarités. C’est un mouvement qui empêchera s’il aboutit tout rêve d’égalité ! Parlons un peu du MR et de la N-VA justement. Car il n’est pas possible en ce 1er mai, où nous fêtons le Travail, de ne pas évoquer son adversaire irréductible : le Capital. Et ceux qui en sont ses plus fervents défenseurs ! Nous avons l’exécutif le plus à droite depuis la libération et le plus agressif vis-à-vis des plus faibles ! Les allocataires sociaux, les chômeurs, les travailleurs malades, les derniers arrivés sur le sol belge et les sans-papiers ont eu à subir les attaques du gouvernement Michel-Jambon. Cela fera bientôt 3 ans qu’ils sont au pouvoir. Trois années de régression sociale généralisée. Il y a 3 ans, la Belgique, tristement avant-gardiste, a fait du Trump avant l’heure : elle a donné le pouvoir à des gens qui ne veulent pas « améliorer le bien-être de tous » mais bien « ajouter aux malheurs de certains ». Comment évoquer l’action de ce gouvernement sans parler de la manière dont certains de ses plus illustres membres nous traitent ? Quand je dis « nous », camarades, je ne parle pas même pas des socialistes, il est compréhensible qu’ils détestent le seul parti de ce pays capable de leur tenir tête ! Non, je parle bien en tant que Molenbeekoise bien disposée à ne pas laisser des sinistres individus comme Jan Jambon nous maltraiter. Chers camarades, en ce jour où l’on sort les drapeaux rouges, je veux envoyer un message clair à ce Ministre de l’Intérieur trop habitué à marcher sur des paillassons bleus ! Molenbeek-Saint-Jean ne sera plus le défouloir de toutes les médiocrités, Molenbeek-Saint-Jean ne sera plus l’excuse de tous les dysfonctionnements, Molenbeek-Saint-Jean ne sera plus, enfin, l’objet de diversion de politiques cherchant la division ! Je voudrais rappeler que les Molenbeekois ont donné une leçon de dignité face aux provocations
Ne rien oublier, relever la tête et défendre une société ouverte et émancipatrice.
En ce 22 mars 2017, nous n’avons rien oublié. Rien oublié des attentats ignobles qui ont tué 32 personnes et blessé 320 autres il y a tout juste un an. Rien oublié de la souffrance des survivants, des familles et des proches. Rien oublié non plus du courage des secouristes, policiers, pompiers, militaires, du personnel de l’aéroport, des travailleurs de la Stib, et des citoyens qui se sont engouffrés dans l’horreur pour venir en aide aux victimes. Définitivement, non. Nous n’oublierons pas ce 22 mars et ce coup de poignard des adorateurs de la secte mortifère DAESH porté au cœur de notre société pour mieux la diviser. Aujourd’hui, leur stratégie porte ses fruits pourris. Les réflexes de repli sur soi et de peur de l’autre sont en augmentation dans toute l’Europe. Impossible de les laisser faire ! Nous ne pouvons laisser la gangrène et les attiseurs de haine s’installer et pulluler, au risque de voir le délitement complet de notre société! Nous devons donc relever la tête, rester lucides et passer à l’action pour défendre nos valeurs de liberté, d’égalité, d’ouverture et de fraternité, pour défendre une société émancipatrice et garantir la sécurité pour tous! Cela veut dire lutter efficacement contre le terrorisme en ciblant son financement et en adoptant un point de vue critique des tensions géopolitiques actuelles. Cela veut aussi dire garantir l’égalité des citoyens et l’émancipation de chacune et de chacun en éradiquant toutes les formes de discriminations, qui font le lit de la haine et du repli sur soi. Cela veut dire construire et alimenter une solidarité chaude, tous les jours, partout et chacun. Une solidarité qui commence généralement entre deux individus, puis s’étend à la famille, pour entraîner parfois ensuite tout le quartier. Une solidarité qui fasse du lien social une réalité concrète. Qui fasse du lien social notre meilleur rempart contre la gangrène des attiseurs de haine. Ce défi, nous le réussirons ensemble et uniquement ensemble ! La plaie est encore ouverte et la cicatrisation difficile mais rappelez-vous : ne rien oublier, relever la tête et défendre une société ouverte et émancipatrice !
A la méfiance et au repli sur soi, nous opposons la fraternité et la bienveillance – Vœux 2017
Camarades, Il fait froid dehors. L’hiver est tombé sur Bruxelles. L’hiver est tombé sur Molenbeek. 2016 nous a laissés le cœur brisé. Les jambes coupées. Les yeux mouillés. 2016 nous a laissés le cœur serré. Le visage dur. Les yeux dans le vague. La peur au ventre. La colère en tête. Pour certains la haine au corps. Nos cris se sont arrêtés à la gorge. Molenbeek a bu le calice jusqu’à la lie. Injustement pointés du doigt, nos jeunes vivent lourds de leurs stigmates, ce code postal honni, « 1080 ». La peur au ventre. La colère en tête. Pour certains la haine au corps. Camarades, Il fait froid dehors. Camarades, Il fait chaud dedans. Il fait chaud ici. Il fait chaud ensemble. 2017 nous trouvera à nouveau ici. Le cœur vaillant. « A cœur vaillant, rien d’impossible ! » La tête froide. Les mains dans le cambouis. Camarades, Il fait chaud ici. Il fait chaud ici parce que nous cultivons l’ouverture, et le dialogue. Parce qu’à la méfiance et au repli sur soi, nous opposons la fraternité et la bienveillance. Parce qu’en découvrant l’autre, nous combattons la peur, et sa suivante, la haine. Camarades, Il fait chaud ici. Parce que notre Parti a entendu notre appel pour une solidarité renforcée entre les communes. 9 millions de plus de dotation de la Région à notre commune. Camarades, Parce qu’il fait chaud ici, c’est d’ici que nous devons repartir à la conquête. Nous devons écouter nos jeunes et leur proposer des solutions. Ainsi la proposition de voir conditionner tout octroi d’aide publique aux entreprises au respect d’un quota de 20% d’engagement dans les quartiers déprivés, comme les nôtres. Car à part d’aucun en l’an 0, nul homme (ni femme 😉 ) n’est destiné à vivre avec des stigmates. Nous devons écouter nos aînés et leur proposer des solutions. Ainsi les initiatives interculturelles et intergénérationnelles car les crimes de 2015 et 2016 ont percé une brèche dans le mur de l’indifférence d’un grand nombre. Il y a donc une opportunité de renouveau du lien, d’expansion rapide et féconde de la fraternité, derrière la menace et la peur. Nous devons écouter nos familles et leur proposer des solutions. Ainsi préserver un modèle d’allocations familiales qui permet de ne pas creuser encore plus les écarts entre les enfants. Ainsi continuer de combattre les solutions iniques qui compliquent la vie des familles pour des économies de bouts de chandelle. Je pense ici aux sommes importantes demandées pour les garderies. 30 euros par enfant par mois, cela fait pour une famille de trois enfants 90 euros par mois. 90 euros dont la plupart des familles ne peuvent pas se passer chaque mois. 90 euros qui, s’ajoutant à un manque de crèches, à des lacunes en formation, à la discrimination à l’embauche, découragent les femmes d’aller chercher du travail ou d’entrer en formation. Car il faut aller chercher les enfants à l’école. Et c’est le type de mesure qui vient créer la misère et les modèles familiaux que la droite décomplexée (et les amis Groen 😉 ) viennent ensuite critiquer. Camarades, C’est seulement tous ensemble, unis, nous serrant les coudes, que nous pourrons être efficaces aux côtés des Molenbeekois. 2016 nous a vu organiser un grand nombre d’activités dans nos murs. Parce qu’il fait chaud ici. Mais 2017, parce que nous avons maintenant consolidé nos bases, doit être l’année « hors les murs ». 2017 doit nous voir démultiplier les actions de terrain. Comme lorsque deux camarades se sont rendus aux côtés d’une vieille dame en difficulté ici derrière. Le bureau et le comité feront appel à vous, camarades, pour ce type d’actions cette année ! Réservez-leur un bon accueil. Je suis convaincue que nous sommes désormais armés pour braver le froid qui règne dehors ! Camarades, Il fait chaud ici. Je nous souhaite pour 2017 qu’il en reste ainsi et que le plus grand nombre nous rejoigne sous ce toit ! Je vous souhaite, je nous souhaite, une très belle année 2017 !