Compte rendu de mon interpellation au Ministre-Président concernant « l’analyse dynamique des quartiers en difficulté dans les régions urbaines belges »:
Mme Catherine Moureaux.- Ce 30 juin, le SPP Intégration sociale rendait publique une étude réalisée à sa demande, sous la direction de l’Université libre de Bruxelles (ULB) en collaboration avec la Katholieke universiteit van Leuven (KUL), réactualisant l’atlas dynamique des quartiers de 2006.
On le sait, les grandes villes belges sont fortement confrontées à des inégalités sociales croissantes, qui se doublent de disparités sociospatiales importantes. Les chercheurs rappellent à ce sujet, je cite, que « bien que les difficultés sociales des habitants des quartiers défavorisés ne proviennent pas essentiellement de la concentration géographique des difficultés sociales, des études ont montré que, toutes choses égales par ailleurs, résider dans un environnement socialement dégradé était un facteur aggravant les difficultés sociales des individus. »
Il y a là bien sûr un constat qui montre l’importance de politiques coordonnées, couplant aménagement du territoire, aide aux personnes, politique de santé, politique de petite enfance… pour venir tout particulièrement en soutien des quartiers fragilisés. Ajoutons aux politiques que je viens de citer les politiques fiscales, qui seront bientôt discutées et qui peuvent avoir une implication fiscale très grande dans l’aménagement du territoire.
L’étude se base sur un panel de 23 indicateurs de santé socio-économique des quartiers classés en quatre catégories : origine sociale et géographique, revenus, précarité sur le marché du travail, perception de revenus de transferts.
Bruxelles apparaît alors comme confrontée à une situation très spécifique. Notre Région concentre en effet une large part de ces quartiers en difficulté, ainsi que le montre l’indice prenant en compte les indicateurs précédemment cités. Elle regroupe à elle seule près de la moitié de la population habitant dans un quartier en difficulté pour l’ensemble de la Belgique. Cela représente près de 700.000 personnes.
Par ailleurs, la Région se distingue aussi par le fait que les habitants des quartiers en difficulté sont moins souvent chômeurs et ouvriers qu’en Wallonie et en Flandre.
Cela signifie qu’ils sont plus souvent bénéficiaires du revenu d’intégration sociale.
L’étude rappelle également le constat connu qu’un effet de concentration de la pauvreté est à l’oeuvre à Bruxelles, notamment parce que les migrants les plus précarisés s’installent dans les quartiers les plus défavorisés. Elle démontre toutefois que les ménages précarisés se déplacent vers les quartiers de moyen standing. Les quartiers très aisés restent en revanche complètement non mixtes socialement parlant. C’est une nouveauté par rapport à la situation de 2006, et cela démontre l’intérêt d’une analyse dynamique des quartiers.
Ainsi, le rapport indique : « Il est très intéressant de noter que le cadrant riche du sud-est de la ville n’accueille ni les nouveaux migrants pauvres, ni les populations plus ou moins précaires quittant les parties centrales pauvres de la ville. Autrement dit, dans un contexte de croissance démographique et d’appauvrissement moyen de la ville, les quartiers sud-est, de même que la majeure partie de la périphérie, ont une population stagnante et dont la composition sociale est assez stable. »
Ainsi, si la Région de Bruxelles-Capitale connaît une certaine amélioration de sa mixité sociale dans certains quartiers, celle-ci est surtout due à un départ des ménages précaires vers les quartiers adjacents aux quartiers les plus défavorisés et, dans une moindre mesure, à un processus d’installation de ménages aux revenus moyens en périphérie de ces quartiers les plus précarisés, processus que les chercheurs n’hésitent pas à qualifier de gentrification, visible notamment autour du canal. Une autre zone pointée est le quartier maritime à Molenbeek.
Avez-vous pris connaissance de cette étude ? Le cas échéant, quels enseignements en tirez-vous ? Quelles sont les mesures prises par le gouvernement pour offrir un soutien spécifique aux quartiers fragilisés ? Comment s’articulent, en particulier pour ces quartiers, politique de développement territorial et politique en matière d’accès à l’emploi ?
Quelles sont les mesures prises par le gouvernement pour lutter contre la fracture géographique entre les quartiers les plus riches et les quartiers les plus pauvres ? Comment entend-il améliorer la mixité sociale dans les quartiers les plus aisés de la capitale ?
M. Bernard Clerfayt.- Je remercie Mme Moureaux d’avoir posé cette question. J’ai moi-même découvert cette étude qui met en évidences des constats marquants sur l’évolution de nos quartiers. Bruxelles affiche une part croissante de pauvreté. Les quartiers où se concentre cette pauvreté présentent aujourd’hui le même visage qu’hier. Par ailleurs, cette pauvreté évolue et atteint des quartiers jusqu’il y a peu épargnés.
Cette étude est donc préoccupante. Je ne reviens pas sur les chiffres relevés par Mme Moureaux, mais je voudrais ajouter deux questions à celles posées.
Cette étude est une mise à jour d’études antérieures déjà réalisées sur la problématique de la fracture sociale à Bruxelles, fracture à laquelle nous sommes confrontés depuis la création de la Région. Nous avons donc déjà mis en place de nombreuses politiques pour tenter d’y répondre.
Va-t-on mettre à jour ce qui sert de guide en Région bruxelloise pour déterminer les zones dans lesquelles nous devons intervenir ? Nous nous basons par exemple beaucoup sur les espaces de développement renforcé de logement et de rénovation (EDRLR), les zones d’intervention prioritaire (ZIP) et d’autres. Ces critères ont été établis sur la base d’études antérieures universitaires croisant une série de données.
En Région bruxelloise, les EDLR sont fondés sur une étude de 2000 qui elle-même se base sur des statistiques de 1995-1996-1997. Cela fait presque 20 ans ! Pourtant, la situation de Bruxelles a beaucoup évolué depuis.
Comptez-vous exploiter cette nouvelle information pour faire évoluer les critères d’analyse géographique sur lesquels nous nous basons pour penser et programmer les politiques publiques de la Région comme le choix des zones de contrat de quartier, les zones d’intervention prioritaire, les zones de défiscalisation des entreprises, les quartiers où mener les actions d’insertion professionnelle, les actions des missions locales pour l’emploi, etc. De nombreux critères d’intervention régionale sont fondés sur cette analyse géospatiale de Bruxelles, il faut la mettre à jour.
Je ne dois sans doute pas préciser que cela a un impact en cascade sur de nombreux dispositifs qui dépassent vos compétences urbanistiques, mais en tant que ministre-président, vous êtes confronté à cet ensemble de critères d’intervention régionale qui conditionnent des montants relativement importants.
Comptez-vous opérer une mise à jour des informations géospatiales sur lesquelles nous fondons les politiques en Région bruxelloise ?
Cette récente étude montre aussi que la pauvreté s’accroit dans les quartiers où elle était déjà présente. Cela pose, j’en ai peur, la question de l’évaluation des politiques menées en Région bruxelloise pour lutter contre la fracture sociale. Que met-on en oeuvre pour évaluer l’efficacité des politiques ? Je ne parle pas ici d’évaluer l’intensité, – nous savons que beaucoup de dispositifs existent -, mais bien de leur efficacité. Comment évaluez-vous les contrats de quartier ?
La Région a mis en oeuvre environ quarante contrats de quartier. Leur impact est mesuré en comptant le nombre de logements, de crèches, de parcs créés, de rues et d’éclairage rénovés. Certes, cela améliore la situation.
Pousse-t-on plus loin l’évaluation ? Peut-on dire quelles zones ont connu deux, trois, quatre couches successives de contrat de quartier en quinze ans ? Et si ces zones ont connu un changement de trajectoire par rapport à d’autres zones ? Est-ce que les contrats de quartier modifient réellement la trajectoire ?
Est-ce que la manière dont nous intervenons, via les contrats de quartier ou d’autres outils, est réellement efficace ? Devrions-nous peut-être la cibler différemment ? Lui donner une ampleur différente ?
À l’occasion de cette étude, nous devons évaluer à la fois les territoires sur lesquels nous agissons, mais aussi les mécanismes à travers lesquels l’action publique s’inscrit dans une politique de lutte contre la pauvreté. Nous devons vérifier si cette action est pertinente et efficace, afin d’assurer le meilleur effet levier et d’améliorer le sort d’un plus grand nombre de Bruxellois.
M. Rudi Vervoort, ministre-président.- La question de la dualisation des quartiers et des inégalités socio-économiques est l’un des aspects les plus importants pris en considération dans nos politiques.
L’étude récente dont vous parlez vient confirmer nos analyses. Plusieurs départements régionaux et pararégionaux en ont pris connaissance et en tireront les enseignements nécessaires pour l’exécution ou la mise en place concrète de certaines politiques durant les prochaines années.
Dans les matières qui me concernent, et plus particulièrement celles liées à la revitalisation urbaine et au développement territorial, nous avons déjà pris des décisions permettant d’articuler plusieurs politiques régionales afin de répondre de manière plus précise ou plus diversifiée à des problèmes récurrents.
Ainsi, à titre d’exemple, l’un des chantiers de la Stratégie 2025 vise à renforcer les synergies entre les services publics de l’emploi et de la formation, l’enseignement de promotion sociale et la mise en place des contrats de quartier durables. L’objectif est de lier plus étroitement le développement du quartier à l’amélioration sociale et économique de ses habitants.
Dans le même esprit, la cellule clauses sociales d’Actiris collabore avec le Service public régional de Bruxelles (SPRB) afin d’encourager l’expérimentation des clauses sociales dans les contrats de quartier. Je vous renvoie à mon collègue, Didier Gosuin, pour les aspects relevant de ses compétences.
Pour ce qui est de la stricte revitalisation urbaine, j’ai souhaité compléter les dispositifs en privilégiant les échanges entre les quartiers, en renforçant les connexions. C’est l’objet des contrats de rénovation urbaine, qui seront prochainement mis en place. Nous pourrons alors couvrir un périmètre plus large que les frontières communales.
Le gouvernement s’est aussi lancé dans la régionalisation de la politique des grandes villes en abordant cette nouvelle matière comme un troisième outil de la politique de revitalisation urbaine. Elle viendra compléter et accentuer les projets et programmes mis en place pour les outils « contrat de quartier durable » et « contrat de rénovation urbaine ». Les montants affectés aux différentes communes dans le cadre de cette nouvelle politique tiendront compte d’une série d’indicateurs socio-spatiaux identifiables, mesurables et actualisables.
À noter qu’une part importante de la programmation Feder 2020 viendra également accentuer les efforts déployés pour aider les quartiers les plus fragilisés à se redresser. À titre d’exemple, l’ensemble des projets de l’axe 4 du programme opérationnel, soit près de 30 millions d’euros, seront implantés dans la zone de revitalisation urbaine (ZRU). Il s’agit essentiellement de projets de grande envergure destinés à offrir à des populations parfois plus fragilisées des équipements fondamentaux de qualité, dont des infrastructures dédiées à la petite enfance et des équipements culturels, comme la rénovation complète du site de l’abbaye de Forest.
Les bases réglementaires, tant pour les contrats de rénovation urbaine (CRU) que pour la politique des grandes villes, sont en cours de rédaction.
Ce travail sur les outils est mené en parallèle avec l’actualisation de la zone prioritaire d’intervention. Nous passerons de la zone espace de développement renforcé de logement et de rénovation (EDRLR) à la zone de revitalisation urbaine (ZRU) qui est légèrement plus grande que l’ancienne EDRLR, avec un mouvement vers l’ouest de Bruxelles, là où les indicateurs socio-économiques restent préoccupants.
Comme présenté dans l’étude « Dynamiques des quartiers en difficulté » à laquelle vous faites référence, il est reconnu que « résider dans un environnement socialement dégradé est un facteur aggravant les difficultés sociales des individus ». Pour soutenir les quartiers les plus touchés par ces difficultés, la Région bruxelloise a créé des périmètres d’action spécifiques afin de lutter contre cette précarité.
La mise en oeuvre de la zone de revitalisation urbaine, dont la définition est principalement axée sur la problématique socio-économique, est une des réponses à la lutte contre la fracture entre les quartiers présentant peu de difficultés sociales et les quartiers plus précarisés.
Sous la législature 2004-2009, il avait déjà été observé, dans le cadre de l’étude « Bruxelles change », que l’état physique des quartiers de l’EDRLR avait évolué favorablement grâce aux dispositifs d’intervention – contrats de quartier, primes à la rénovation, exonération fiscale à l’achat -, à l’exception de certaines poches restant fortement problématiques. Le principal constat négatif était lié aux difficultés en termes d’entretien des espaces publics par la plupart des communes.
Par contre, nous avions remarqué dans le cadre des travaux concernant le monitoring des quartiers que la situation socioéconomique des habitants tendait à stagner ou pire, se dégrader. Dans ce cadre, un nouvel espace de développement renforcé de logement et de rénovation (EDRLR), dénommé plus simplement zone de rénovation urbaine (ZRU) avait été défini, également en 2007, afin de pouvoir répondre à cette situation.
La définition de cette ZRU reposait sur une méthode qui consistait à analyser la précarité, d’une part, à l’échelle du secteur statistique afin d’assurer la comparaison des indicateurs dans le temps, et dès lors la pérennité de l’évaluation de la situation socioéconomique de la Région et, d’autre part, à partir de 3 indicateurs dits « synthétiques » : le marché du travail, les revenus et la qualité de l’habitat.
Il avait été conclu que 40% des ménages bruxellois les plus précarisés résidaient dans les quartiers localisés dans la ZRU et que la précarité tendait à s’étendre au-delà du périmètre de l’EDRLR défini en 2002, particulièrement à l’Ouest et au Sud-Ouest de notre Région.
Néanmoins, le travail de définition de la ZRU en 2007 présentait certaines limites :
– les données statistiques sur le logement (particulièrement l’état intérieur), issues de l’enquête socioéconomique de 2001, n’étaient pas actualisables sans la réalisation d’une nouvelle enquête socioéconomique ou d’une étude régionale par secteur statistique ;
– certaines données sont aujourd’hui moins pertinentes au vu de l’évolution socioéconomique du territoire bruxellois, car faiblement liées aux dimensions de la précarité ;
– la lecture et la compréhension de la méthodologie présentant la ZRU dans le cadre du monitoring des quartiers étaient très complexes, ce qui présentait des difficultés à l’utiliser comme outil stratégique.
Au regard de ce qui précède, le cabinet du ministre-président Charles Picqué, lors de la précédente législature, avait demandé à l’Agence de développement territorial pour la Région de Bruxelles-Capitale (ADT), dans le cadre des travaux préparatoires au projet de PRDD, d’évaluer la pertinence de la ZRU de 2007.
Cette évaluation devait actualiser certaines données socioéconomiques et/ou définir de nouveaux indicateurs correspondant mieux aux «quartiers en difficulté» : taux de chômage, revenu médian et densité de population.
L’Agence de développement territorial pour la Région de Bruxelles-Capitale (ADT) devait en outre mener une série d’enquêtes de terrain, sur le modèle de celles utilisées pour déterminer l’espace de développement renforcé de logement et de rénovation (EDRL) en 1995 et en 2002. Celles-ci permettent d’analyser l’état extérieur du bâti, comme l’état visuel des façades et le simple ou double vitrage, de certains secteurs statistiques sortant de l’ex-EDRLR ou entrant dans la nouvelle zone de l’EDRL.
Ces différents indicateurs cumulés ont permis de définir une nouvelle zone d’intervention prioritaire visant à poursuivre et à renforcer les opérations de revitalisation urbaine dans les quartiers les plus défavorisés de la Région de Bruxelles-Capitale. Ont ainsi été inclus au sein de la ZRU des pôles de développement comme Tour et Taxis, la Gare de l’Ouest et la Gare du Midi, où très peu ou nulle population ne vit. Ceux-ci sont évidemment exclus de l’étude sur les quartiers en difficulté dont vous faites référence. Ces quartiers, même s’ils ne concentrent pas de population précarisée, peuvent constituer des fractures territoriales. Il est donc important de les prendre en compte dans les analyses et dans les politiques de développement urbain. C’est un enjeu essentiel que de cicatriser cette fracture en termes de vie et d’habitat.
Il est intéressant de noter que la définition de la ZRU a été réalisée en identifiant les quartiers précarisés sur base de trois indicateurs répondant aux dimensions de l’indice synthétique de difficulté de l’étude de l’ULB-KUL : les origines de la population, les revenus, la précarité sur le marché du travail, et les ménages précaires et le revenu de transfert.
Excepté les quartiers de logements sociaux, où des politiques spécifiques sont menées, et des quartiers particuliers comme le campus, les quartiers en plus grande difficulté identifiés dans l’étude sont repris dans la ZRU.
L’étude de l’ULB-KUL dresse les mêmes constats observés tout au long de l’élaboration de la ZRU. Si les auteurs mettent en avant une évolution de la mixité et, donc, de la précarité aux marges des quartiers, c’est également dans ces zones que les vérifications de terrain ont été les plus importantes dans le cadre de l’évolution de l’EDRLR vers la ZRU, comme énoncé plus haut.
L’étude met en avant le besoin important de données sur l’immobilier, car « la qualité et le statut des logements peuvent avoir des impacts importants sur les autres dimensions de la précarité ». Ce problème d’accès à des données fiables et actualisées sur le logement est récurrent. Pour parer à ce manque, des enquêtes de terrain ont été réalisées dans le cadre des études préparatoires à la ZRU, mais elles restent ponctuelles et ne couvrent que les quartiers dont la précarité vue à travers les statistiques était remise en question.
L’ADT, la Direction études et planification (DEP) et l’Institut bruxellois de statistique et d’analyse (IBSA) discutent de la possibilité de travailler dès l’année prochaine sur la production de données sur le sujet, qui pourront servir également à une série de diagnostics territoriaux. La discussion pourrait être ouverte au Service public de programmation Intégration sociale (SPP IS) et à l’équipe de l’ULB-KUL.
Je le répète, compte tenu de nos contraintes budgétaires, la capacité d’évaluer les politiques mises en oeuvre est un élément essentiel. Sans cela, nous risquerions de manquer nos objectifs.
C’est le processus qui a été mis en oeuvre dans le cadre de la Stratégie 2025, avec les partenaires sociaux, à savoir se doter au fur et à mesure d’outils permettant d’évaluer les politiques mises en oeuvre – emploi, formation… Nous disposerons prochainement de chiffres à cet égard devant nous permettre de déterminer si nous avons en tout ou en partie atteint les objectifs poursuivis. Et il en va de même ici.
C’est l’esprit à l’oeuvre dans la création du Bureau bruxellois de planification, c’est aussi le rôle de l’IBSA, qui sera amené à développer ces outils d’évaluation, de collecte de données et surtout de croisement des données. Malheureusement, la Région a laissé se créer au fil du temps différents acteurs qui se sont accumulés et ont formé une espèce de lasagne. Il est temps de fluidifier la communication entre tous ces acteurs. Comme les informations ne sont pas croisées, elles n’apportent pas tous les bénéfices qu’elles pourraient apporter en termes de politique urbaine. C’est d’ailleurs un objectif de l’accord de majorité.
Concernant les autres mécanismes, soyez assuré que nous travaillons aussi à la lumière de ces nouveaux indicateurs.
Mme Catherine Moureaux.- La réponse est dense et comporte énormément de nouvelles informations. Elle suscite en moi deux réflexions.
La première concerne l’avenir de l’outil atlas dynamique. Dans le cadre de la régionalisation de la politique des grandes villes, je pense que le gouvernement fédéral se dédouane complètement d’une telle analyse dans le futur. Or c’est un outil très précieux par rapport aux problématiques rencontrées à Bruxelles et aux mouvements de population en lien avec leurs caractéristiques socio-économiques. Ne faudrait-il donc pas dès aujourd’hui – la question reviendra dans deux ou trois ans -, évoquer l’idée d’accords de coopération avec les Régions adjacentes pour pouvoir continuer à travailler à un modèle d’atlas dynamique qui ressemble à celui que nous avons ici ? Vous évoquez l’année prochaine la sortie d’un outil qui témoignerait d’un partenariat et d’un décloisonnement entre les données de différentes institutions bruxelloises, mais la question doit se vivre au-delà de la seule Région bruxelloise, en tenant compte du bassin bruxellois, de la Région, de l’entité métropolitaine, quelle que soit la manière dont on en parle.
Deuxième réflexion : jusqu’à présent, nous avons essentiellement travaillé à revitaliser les populations dans les quartiers fragilisés. Mais nous avons crûment posé la question de l’enfermement des quartiers à indice socio-économique élevé : ceux-là ne bougent pas. À ce propos, je vous pose une question ouverte pour le futur : quels éléments de politique peut-on mettre en place vis-à-vis de ces quartiers ?
Il y a, bien sûr, des disparités au sein des communes, mais ce qui est montré ici c’est que l’axe est-ouest est très marqué.
M. Rudi Vervoort, ministre-président.- C’est un axe transversal qui ignore totalement les frontières.
Mme Catherine Moureaux.- Tout à fait. Les frontières administratives ne sont pas touchées, mais bien les frontières géographiques, comme vous le signaliez à propos de la gare du Midi.
Ce que je veux mettre en évidence c’est qu’étant donné la difficulté manifeste du gouvernement fédéral de répartir la masse de réfugiés au sein de la population belge, nos quartiers déjà précarisés connaîtront – conformément à ce que disent les chercheurs – un afflux important de ce genre de population.
À cet égard, la Région devrait se poser la question de savoir comment impliquer les quartiers à indice socioéconomique élevé ?