Intervention de Catherine Moureaux, cheffe de groupe PS au PFB, dans la séance parlementaire régionale consacrée aux attentats du 13 novembre 2015 à Paris. Bruxelles, le 20 novembre 2015. Mesdames et Messieurs les Ministres, chers collègues, Nous sommes aujourd’hui confrontés à l’un des défis majeurs de l’Histoire de notre Région. Dans les heures et les jours qui viennent, il est impératif que nous nous montrions à la hauteur de ce que la Nation attend de ses élus. En tant que parlementaires, nous nous devons de faire émerger une parole qui, dans cette enceinte et en dehors, soit respectueuse de la confiance que nous avons reçue de la population. Une parole qui soit digne des luttes ayant permis l’avènement de la démocratie représentative. Une parole porteuse d’espoir pour notre société et pour l’ensemble de ses composantes. Mais permettez-moi, pour commencer, de me joindre aux condoléances aux familles et aux proches des victimes des attentats de Paris. Toutes nos pensées doivent aller tout d’abord à ceux qui sont tombés il y a tout juste une semaine et à leurs familles. Ce 13 novembre, des criminels ont frappé la Ville-Lumière avec une férocité de nature à ébranler la foi que nous sommes nombreux à avoir en l’humanité et en son devenir. L’affrontement qui est en cours est brutal. Il ne faut en aucun cas qu’il porte atteinte à notre lucidité. Nous devons rappeler avec force que cet affrontement n’est ni religieux ni civilisationnel. Cet affrontement se fonde, d’après moi, sur trois antagonismes fondamentaux. Celui entre le courage et la lâcheté. Celui entre l’ouverture et le repli sur soi. Et celui entre la vie et la mort. Courage contre lâcheté parce que l’ennemi est extrêmement lâche. Pour s’en prendre de manière froide et détachée à un nombre si conséquent de victimes, il faut effectivement être incroyablement lâche. Face à cette lâcheté, nous devons faire preuve d’un grand courage, tout d’abord pour surmonter nos peurs. La peur d’être victime d’une folie meurtrière. La peur de ne pas savoir protéger notre famille et les gens auxquels nous tenons. La peur de changer son regard sur la différence. La peur d’être jugé pour les crimes d’autres. La peur de renoncer à notre idéal de fraternité enfin. Mais le courage est aussi nécessaire pour remettre en question nos certitudes. Il convient d’admettre qu’il y a un divorce entre les grands principes de la Déclaration des Droits de l’Homme que notre démocratie a faits siens et la réalité vécue dans notre pays. Ainsi, si nous partageons tous l’enjeu de renforcer notre société aujourd’hui sous la menace de ces monstrueux détracteurs, nous devons avoir le courage de dresser certains constats. Nous devons nous donner les moyens d’aller vers une égalité de fait bien plus grande que celle qui prévaut aujourd’hui, que ce soit en matière d’accès à l’enseignement, à l’emploi ou au logement. Nous devons avoir le courage de remettre en question la politique internationale qui est menée par la Belgique, ses entités fédérées et ses alliés. « Le courage c’est de trouver la vérité et de la dire » disait Jaurès. Eh bien, le temps est venu d’un langage de vérité vis-à-vis des pétromonarchies du Golfe! Nous devons les obliger à répondre de leurs rapports ambigus avec DAESH. Nous devons faire preuve de courage, et cela me permet de faire le lien avec le second antagonisme, pour choisir notre camp : celui de l’ouverture ou celui du repli sur soi. Les difficultés identitaires sont une des causes majeures du recrutement par les Djihadistes de nos jeunes. On ne peut concevoir autrement cette triste réalité que comme une défaite de notre société. Mais peut-on dès lors imaginer que notre réponse à cela réside en une forme accrue d’exclusion, qui génèrerait davantage de repli ? Pour permettre à des cultures, des religions, des traditions et des origines différentes de vivre ensemble, la référence aux valeurs humanistes fondamentales est un préalable. La lutte contre le radicalisme est ainsi indissociable de la lutte contre le racisme, l’antisémitisme, l’islamophobie et toutes les formes d’exclusion. L’adhésion à un projet de société commun à tous les citoyens, passe par l’adhésion à ces valeurs. Car le terrorisme, alimenté par la haine, a pour but principal la division de notre société ! Je voudrais faire résonner ici les paroles très justes du Premier Ministre Norvégien, Jens Stoltenberg, qui, après l’attentat d’Anders Breivik, militant d’extrême-droite, disait: «J’ai un message pour celui qui nous a attaqué et pour ceux qui sont derrière tout ça: vous ne nous détruirez pas. Vous ne détruirez pas la démocratie et notre travail pour rendre le monde meilleur. Nous allons répondre à la terreur par plus de démocratie, plus d’ouverture et de tolérance.». Enfin, il convient également de prendre le parti de la vie contre celui de la mort. Il faut se rappeler que « Viva la muerte » -« vive la mort »- était le slogan des pires sicaires du franquisme durant la guerre d’Espagne. Ainsi, Milan Astray, le fondateur de la légion espagnole, scanda le premier ce sinistre cri. Les états de service de ce militaire réputé pour sa cruauté ont résidé principalement dans les crimes de guerre perpétrés sous son commandement durant la guerre coloniale menée par l’Espagne au Maroc. « Viva la muerte » était le cri de ralliement de tous les obscurantistes fanatiques du régime, qui haïssaient de toutes leurs forces les démocrates, les progressistes et les esprits libres, dont les symboles étaient les villes cosmopolites de Madrid et Barcelone. Aujourd’hui, la réponse la plus convaincante à apporter face aux nouveaux adorateurs de la mort, cette secte qui déteste notre société et son ouverture, c’est de célébrer la vie et d’en faire étalage ! C’est de continuer à fréquenter les événement festifs, les lieux de socialisation, les espaces de rencontre ! C’est d’œuvrer tant à l’émancipation sociale qu’à l’épanouissement individuel ! C’est d’être partie prenante du brassage des cultures. C’est de considérer la diversité comme une richesse. C’est de promouvoir à tous les niveaux toutes les formes de mixité.
Osons la force de toutes les solidarités !
Discours en vue du congrès de la Fédération Bruxelloise du PS, Saint-Gilles, 6 octobre 2015. Camarades, Il me revient d’aborder la question de la santé et des personnes âgées. Deux thèmes où la solidarité est omniprésente. J’aborderai notamment la thématique de la solidarité entre les générations et l’articulation entre les solidarités. Nous ne sommes pas égaux devant la maladie et la mort. Savez-vous qu’à Bruxelles aujourd’hui la mortalité foeto-infantile passe du simple au double selon que l’on naisse dans un ménage où les deux parents travaillent ou dans un ménage sans revenu du travail! Ce constat amène une émotion. L’injustice, l’inégalité nous frappent. De cette émotion, que vous ressentez vous aussi, naît des actes concrets. Ces actes, c’est aider sa voisine malade en allant chercher les médicaments à la pharmacie. C’est donner un peu d’argent à Médecins du Monde pour favoriser l’accès aux soins des plus démunis. C’est toute une série de choses que nous pouvons décider de faire quotidiennement. De cette émotion et de ces actes peuvent naître aussi une ambition politique. C’est comme ça qu’est née au siècle passé notre Sécurité Sociale. Laissez-moi vous parler un peu de cette grande dame. Aujourd’hui les chiffres de Solidaris démontrent combien elle est vitale pour des millions de Belges : Solidaris nous dit que sans elle on passerait pour la population à risque de pauvreté de 15% à 43%! 43% ! Ce chiffre montre toute la force de solidarité qu’a pu créer un tel système de redistribution, de justice sociale. Ce que nous avons mis et mettons en place comme mécanismes structurels de solidarité, le sociologue Pierre Rosanvallon en parle comme de la « solidarité froide ». Pour arriver à créer cette solidarité, ces solidarités froides, il faut –comme je vous le disais au début de mon exposé- une émotion face à l’injustice, face aux inégalités. Il faut passer par une étape de mobilisation citoyenne, qu’elle soit individuelle ou collective. Il faut ce qu’il appelle de la « solidarité chaude ». L’actualité nous a livré hier un exemple marquant de solidarité chaude. Celui de Marcelle Bennick. Il s’agit de la Schaerbeekoise de 73 ans qui a été mise à l’honneur parce que première citoyenne à ouvrir son foyer à une famille de réfugiés syriens. Il n’y a pas si longtemps que ça je travaillais comme médecin dans une maison médicale. Les médecins, les kinésithérapeutes, les infirmiers étaient nombreux à sortir largement et régulièrement de leur fonction. Ils étaient nombreux, qui à aller chercher le pain à la boulangerie, qui à sortir les poubelles de patients fragilisés, qui simplement à s’arrêter pour causer quelques minutes de la vie. Et cela malgré, ou devrais-je plutôt dire, à côté d’un système d’aides familiales bien rôdé. C’est de la solidarité chaude. Cela contribuait à améliorer le bien-être des patients et à améliorer la relation de soins. Mais cela permettait aussi de créer du lien social. Ne pas juste représenter le système, occuper une case du système, mais bien vivre avec les autres. Véritablement à leurs côtés. La solidarité chaude, c’est une spirale de vie. C’est une dynamique positive. Qui se vit d’abord entre deux individus, puis s’étend à la famille, pour entraîner parfois ensuite tout le quartier. C’est qu’il y a, il y aura toujours, besoin de solidarité chaude, avant et à côté des solidarités froides. Camarades, nous avons aujourd’hui plus que jamais l’impératif d’incarner la solidarité. Nous devons proposer, construire, et produire des systèmes de protection. Nous devons également pied à pied défendre notre Sécurité Sociale. Mais nous devons aussi, chacun à notre niveau, incarner la solidarité. Tous les jours, inlassablement. Nous, Socialistes, nous ne pouvons pas voir le progrès uniquement comme quelque chose d’impersonnel, de désincarné, de froid. Camarades, le progrès, c’est chaud ! C’est la chaleur du lien social. C’est la place pour chacun autour du feu. Camarades, osons la force de la solidarité. Osons la force de toutes les solidarités ! Catherine Moureaux.
Journée internationale de la Francophonie – intervention
En cette journée internationale de la francophonie, ce sont les mots que nous devrions mettre à l’honneur. Mais en ces temps troublés peut être devrions nous aussi nous souvenir quelles sont les valeurs communes que partage la francophonie. Rappelons que l’idée même de la francophonie et de son développement fin des années soixante a été l’œuvre de deux présidents africains : Léopold Senghor et Habib Bourguiba, le père de l’indépendance de la Tunisie. La philosophie de la Francophonie est de mettre le français au service de la solidarité, du développement et du rapprochement des peuples, et ce par un dialogue permanent des peuples. Se retrouver dans le respect de nos différences, tel est l’objectif de la francophonie. Cet objectif nous le partageons pleinement à Bruxelles. Il est la base de notre projet de ville. Et aujourd’hui plus que jamais la francophonie se doit de jouer son rôle au niveau international. Je pense ici à l’attentat survenu à Tunis ce mercredi. Le peuple tunisien a besoin d’entendre notre solidarité. C’est cela aussi l’espace francophone. Il doit permettre de rassembler, échanger, converser, s’unir et s’entraider.