Grosse mobilisation citoyenne le 13 janvier dernier pour exiger la démission de Théo Francken! Nous étions au moins 6500! Nous avons défilé dans le calme, mais la colère était palpable. Non la torture n’est pas acceptable, non les mensonges ne sont pas acceptables, et oui il faut que le MR montre la sortie à Francken! Envoyer des fichiers
Opposition au CETA : le front s’élargit!
Ce 24 mai 2016, la Commission du Parlement francophone bruxellois dédiée aux Relations Internationales a adopté une proposition de résolution relative à l’accord économique et commercial global entre l’Union européenne et le Canada, mieux connue sous le nom de CETA. Texte adopté: Proposition de résolution relative à l’accord économique et commercial global entre l’Union européenne et le Canada (AECG/CETA)
Le colonialisme belge et ses crimes doivent être enseignés à l’école !
Aujourd’hui encore notre histoire coloniale n’est pas totalement assumée. Alors que de plus en plus d’ouvrages, études, reportages mettent en lumière la part sombre de la colonisation et ses multiples exactions et crimes, un « devoir d’histoire » reste à faire. Ce « devoir d’histoire » doit passer par notre enseignement. D’après mon expérience et le travail de recherche sur la question que j’ai mené, la situation n’est pas encore idéale dans les écoles. C’est pourquoi j’ai interrogé la Ministre de l’éducation. Mon intervention – Madame la Ministre, Dernièrement, la polémique sur le roi Léopold II a ressurgi suite à l’initiative d’un échevin d’organiser une cérémonie en l’honneur de celui-ci pour son empreinte urbanistique et architecturale importante à Bruxelles. C’était évidemment faire fi de notre histoire coloniale et des crimes commis sous son autorité. Une histoire coloniale pas totalement assumée, et à tout le moins, toujours sujette à crispations. Si de plus en plus d’ouvrages, études, reportages mettent en lumière la part sombre de la colonisation, un «devoir d’histoire » reste à faire. Un « devoir d’histoire » qui doit passer par notre enseignement. Madame la Ministre, Pouvez-vous me dire où en est la redéfinition des référentiels pour l’enseignement général? En 2014, le Parlement a adopté un nouveau référentiel pour les cours d’histoire et géographie dans l’enseignement qualifiant. La colonisation du Congo y figure, ce qui est déjà une avancée. Cependant l’usage de ces référentiels en termes de contenus centrés sur l’histoire coloniale demeure aléatoire. Certains élèves peuvent totalement passer à côté durant leur scolarité. Ce qui est interpellant en regard de l’importance d’une telle séquence dans notre histoire belge. Vous aviez indiqué que ce contenu pourrait profiter de la dynamique du Pacte pour un enseignement d’excellence pour apporter les précisions nécessaires. Pouvez-vous nous dire où en est ce travail? Quelles seront ou sont les démarches sur ce sujet déjà entreprises, notamment avec les professeurs des universités et hautes écoles qui ont travaillé sur la thématique ? Toujours dans cette optique, il est également essentiel de mettre à disposition des écoles des outils et ressources pédagogiques. La traduction des référentiels en dépend largement. Certains ont existé, je pense au kit pédagogique réalisé par l’asbl Culturea « Congo », qui contient deux dvd et des fiches pédagogiques. Pouvez-vous dire si celui-ci est toujours utilisé par les écoles ? D’autres outils ou ressources existent-ils ? Ces outils sont-ils à la disposition des écoles et des professeurs de façon permanente ? Une formation par l’Institut de la formation en cours de carrière avait également été organisée sur le sujet en 2013. Pouvez-vous m’indiquer si cette formation est toujours disponible ? Et si oui, quelles en sont les modalités aujourd’hui? La Ministre de l’Éducation, de la Culture et de l’Enfance. – En termes de savoir, nous avons beaucoup de choses à ajouter dans nos cursus par rapport au cadre actuel. Il est évidemment difficile de laisser un élève sortir de rhétorique ou de classe terminale sans qu’il connaisse au moins les éléments clés de l’histoire de son pays. La période coloniale fait partie de la période sombre, mais il doit la connaître. Le référentiel d’histoire de l’enseignement secondaire de transition est en effet en cours de réécriture depuis le mois de septembre tandis que le référentiel de l’enseignement qualifiant a été adopté par le Parlement en décembre 2014. Le fait que les enseignants abordent cette matière en classe dépend de la précision de leurs programmes, plus ou moins contraignants, qui, euxmêmes, sont le reflet de référentiels plus ou moins précis. Dans les travaux du Pacte d’excellence, je plaide pour que les référentiels soient hyper précis et beaucoup plus précis qu’ils ne le sont maintenant. Cela laisse moins de marge de manoeuvre pour les programmes, car je pense que ce que l’on offre comme contenu pour les compétences ou les savoirs des enfants est une matière d’intérêt général. Il faut donc être beaucoup plus précis. Comme vous le verrez tout à l’heure, dans la présentation qui va vous être faite du référentiel en matière de citoyenneté, on s’est basé sur le modèle des socles de compétences. Vous allez voir à quel point les socles de compétences en primaire sont quasiment nuls par rapport aux référentiels, en dehors du socle de compétence. C’est à ce niveau qu’on se rend compte de l’extrême légèreté des référentiels qui laissent des latitudes de contenus énormes et où on peut très peu préciser les savoirs, les thèmes, etc. Les courants romantiques sont-ils à enseigner dans le cours de français? Quel type de philosophe doit-il être étudié? Rien de tout cela n’est précisé. À titre personnel, cela me semble absurde. Actuellement, le colonialisme, l’histoire des migrations qui apportent une diversité à notre population font partie des fondements de notre histoire. Appréhender notre colonialisme passé doit faire clairement partie du cours d’histoire pour tout le monde. Cette question est laissée à l’appréciation des uns et des autres. Ce mouvement qui vise plus de précision des référentiels est en cours. C’est clairement une des recommandations du Pacte dont nous en avons parlé longuement durant ces trois jours. Le groupe est présidé par le Professeur Marc Romainville de Namur et un sous-groupe, qui comprend notamment des didacticiens, se réunit avec Axel Tixhon. Toute une série de recommandations très claires sont données en la matière. Il existe un excellent outil pédagogique – Congo –, qui comprend deux DVD ainsi que des fiches pédagogiques. En octobre dernier, dans la réponse que j’ai donnée à Mme Trachte sur la place de la mémoire, j’en ai parlé en disant qu’il avait été envoyé dans toutes les écoles de la Fédération Wallonie-Bruxelles en janvier 2013. Cet outil a donné lieu à une formation en février 2013, qui n’a, hélas, accueilli que 42 inscrits. Nous avons cependant offert cet outil aux écoles et il faudra lui donner une seconde chance. L’ouvrage et le DVD sur l’histoire coloniale de la Belgique au Congo ont été édités par le Musée Royal de l’Afrique centrale au départ de ses riches collections d’archives. Cette publication offre des regards variés à partir desquels les enseignants peuvent élaborer des cours
« C’est absurde de rejeter la faute sur la gestion communale » Interview dans l’Écho 28/11/2015
Installée depuis un peu plus de trois semaines à Molenbeek, la fille de Philippe Moureaux regrette la nouvelle renommée internationale de la commune. Depuis les attentats de Paris, Molenbeek est sous le feu des projecteurs. Quel est votre sentiment par rapport à l’image donnée de la commune? Tout aurait été différent si l’assaut avait d’abord été donné à Saint-Denis et qu’on avait d’abord trouvé des auteurs français. Aujourd’hui, il y a une blessure à Molenbeek, surtout au niveau de sa renommée internationale. Les médias français ont titré « ghetto de misère », pour parler de Molenbeek. C’est très blessant. Ce n’était déjà pas facile. Maintenant, c’est pire. Que pensez-vous de la gestion de crise menée par votre bourgmestre, Françoise Schepmans (MR)? La gestion de crise s’est beaucoup faite au niveau du Fédéral, finalement. Et il aurait été irresponsable de donner les clés de la commune au Fédéral. Car il a des propos qui sont assourdissants de stigmatisation notamment quand il dit vouloir nettoyer Molenbeek. Mais je sais que Françoise Schepmans partage mon avis sur ce point. Vous êtes donc plutôt contente de la façon dont elle a fait face aux événements? Je ne peux pas dire qu’elle a mal géré. On n’a pas encore toutes les réponses. La situation est grave et complexe. Aujourd’hui, il faut faire le diagnostic. C’est pour cela que j’ai proposé de créer une union communale et citoyenne pour avoir une réflexion qui transcende les partis et qui rassemble les citoyens. On a besoin de tout le monde pour comprendre. Mais Françoise Schepmans a refusé. Ça m’a déçue. Mais elle a dit qu’elle voulait d’abord travailler au sein du conseil et puis ensuite on pourrait travailler dans ce sens-là. Donc, j’attends. Certains mettent directement en cause la gestion de la commune par votre père. On lui reproche d’avoir laissé les choses aller… C’est terriblement injuste. On ne peut pas dire que c’est à cause de la gestion communale de qui que ce soit que de tels événements se produisent. C’est absurde. Aujourd’hui, on se plaît à établir une liste de personnes qui sont nées, qui ont transité, qui ont travaillé, qui se sont mariées, etc. à Molenbeek mais ça n’éclaire en rien. Le fait que des éléments d’enquête ramènent à Molenbeek pose quand même question. La bourgmestre a bien répondu sur ce point. Elle a dit qu’il y avait une facilité d’anonymat à Molenbeek. C’est vrai. C’est une des communes les plus denses. C’est la plus jeune aussi. Et il y a un haut taux d’immigration. La politique d’intégration de votre père est aussi mise en cause. Mon père est le symbole d’un modèle de vivre ensemble. À Londres, le modèle d’intégration est communautariste et extrêmement ouvert au niveau des religions. À Paris, c’est le modèle républicain, assimilationniste qui gomme les différences pour rentrer dans un moule. Mon père se situe entre le communautaire londonien et l’hyper laïc à la française. Dans chacune de ces villes, il y a des radicalisés et des attentats alors que les politiques sont très différentes. Ça prouve que le modèle d’intégration ne donne pas à lui seul la réponse. Et puis je signale qu’à Schaerbeek, c’est la même politique de vivre ensemble qui est menée. Le modèle n’est pas propre à Molenbeek. Et que reproche-t-on précisément? Je cherche des faits précis. Attendait-on qu’il mette certaines personnes à la porte? On dit qu’il n’aurait pas dû autoriser, qu’il aurait dû fermer… Je rappelle que les gens peuvent se réunir et former des associations dans un état de droit. Vous trouvez qu’on fait un mauvais procès à votre père? La commune, c’est un niveau de pouvoir qui a ses limites. C’est pour cela qu’aujourd’hui, je ne veux pas taper sur qui que ce soit. Car il y a des responsabilités à plusieurs niveaux de pouvoir. À un premier niveau, il y a la sécurité et les renseignements. Ensuite, il y a la Justice. La commune n’est pas la première responsable. Vous inscrivez-vous dans l’héritage politique de votre père? Pour moi, ce qui est important, c’est l’égalité. L’État doit assurer le droit à la différence. Interdire le port de tout signe religieux dans l’espace public, pour moi, c’est du fascisme. On doit respecter la différence. Mais il faut un appareil d’État laïc. Le religieux doit rester dans la sphère privée. Interview par Anaïs Sorée, 28 novembre 2015, L’Echo
L’ombre ne vaincra pas la lumière
Intervention de Catherine Moureaux, cheffe de groupe PS au PFB, dans la séance parlementaire régionale consacrée aux attentats du 13 novembre 2015 à Paris. Bruxelles, le 20 novembre 2015. Mesdames et Messieurs les Ministres, chers collègues, Nous sommes aujourd’hui confrontés à l’un des défis majeurs de l’Histoire de notre Région. Dans les heures et les jours qui viennent, il est impératif que nous nous montrions à la hauteur de ce que la Nation attend de ses élus. En tant que parlementaires, nous nous devons de faire émerger une parole qui, dans cette enceinte et en dehors, soit respectueuse de la confiance que nous avons reçue de la population. Une parole qui soit digne des luttes ayant permis l’avènement de la démocratie représentative. Une parole porteuse d’espoir pour notre société et pour l’ensemble de ses composantes. Mais permettez-moi, pour commencer, de me joindre aux condoléances aux familles et aux proches des victimes des attentats de Paris. Toutes nos pensées doivent aller tout d’abord à ceux qui sont tombés il y a tout juste une semaine et à leurs familles. Ce 13 novembre, des criminels ont frappé la Ville-Lumière avec une férocité de nature à ébranler la foi que nous sommes nombreux à avoir en l’humanité et en son devenir. L’affrontement qui est en cours est brutal. Il ne faut en aucun cas qu’il porte atteinte à notre lucidité. Nous devons rappeler avec force que cet affrontement n’est ni religieux ni civilisationnel. Cet affrontement se fonde, d’après moi, sur trois antagonismes fondamentaux. Celui entre le courage et la lâcheté. Celui entre l’ouverture et le repli sur soi. Et celui entre la vie et la mort. Courage contre lâcheté parce que l’ennemi est extrêmement lâche. Pour s’en prendre de manière froide et détachée à un nombre si conséquent de victimes, il faut effectivement être incroyablement lâche. Face à cette lâcheté, nous devons faire preuve d’un grand courage, tout d’abord pour surmonter nos peurs. La peur d’être victime d’une folie meurtrière. La peur de ne pas savoir protéger notre famille et les gens auxquels nous tenons. La peur de changer son regard sur la différence. La peur d’être jugé pour les crimes d’autres. La peur de renoncer à notre idéal de fraternité enfin. Mais le courage est aussi nécessaire pour remettre en question nos certitudes. Il convient d’admettre qu’il y a un divorce entre les grands principes de la Déclaration des Droits de l’Homme que notre démocratie a faits siens et la réalité vécue dans notre pays. Ainsi, si nous partageons tous l’enjeu de renforcer notre société aujourd’hui sous la menace de ces monstrueux détracteurs, nous devons avoir le courage de dresser certains constats. Nous devons nous donner les moyens d’aller vers une égalité de fait bien plus grande que celle qui prévaut aujourd’hui, que ce soit en matière d’accès à l’enseignement, à l’emploi ou au logement. Nous devons avoir le courage de remettre en question la politique internationale qui est menée par la Belgique, ses entités fédérées et ses alliés. « Le courage c’est de trouver la vérité et de la dire » disait Jaurès. Eh bien, le temps est venu d’un langage de vérité vis-à-vis des pétromonarchies du Golfe! Nous devons les obliger à répondre de leurs rapports ambigus avec DAESH. Nous devons faire preuve de courage, et cela me permet de faire le lien avec le second antagonisme, pour choisir notre camp : celui de l’ouverture ou celui du repli sur soi. Les difficultés identitaires sont une des causes majeures du recrutement par les Djihadistes de nos jeunes. On ne peut concevoir autrement cette triste réalité que comme une défaite de notre société. Mais peut-on dès lors imaginer que notre réponse à cela réside en une forme accrue d’exclusion, qui génèrerait davantage de repli ? Pour permettre à des cultures, des religions, des traditions et des origines différentes de vivre ensemble, la référence aux valeurs humanistes fondamentales est un préalable. La lutte contre le radicalisme est ainsi indissociable de la lutte contre le racisme, l’antisémitisme, l’islamophobie et toutes les formes d’exclusion. L’adhésion à un projet de société commun à tous les citoyens, passe par l’adhésion à ces valeurs. Car le terrorisme, alimenté par la haine, a pour but principal la division de notre société ! Je voudrais faire résonner ici les paroles très justes du Premier Ministre Norvégien, Jens Stoltenberg, qui, après l’attentat d’Anders Breivik, militant d’extrême-droite, disait: «J’ai un message pour celui qui nous a attaqué et pour ceux qui sont derrière tout ça: vous ne nous détruirez pas. Vous ne détruirez pas la démocratie et notre travail pour rendre le monde meilleur. Nous allons répondre à la terreur par plus de démocratie, plus d’ouverture et de tolérance.». Enfin, il convient également de prendre le parti de la vie contre celui de la mort. Il faut se rappeler que « Viva la muerte » -« vive la mort »- était le slogan des pires sicaires du franquisme durant la guerre d’Espagne. Ainsi, Milan Astray, le fondateur de la légion espagnole, scanda le premier ce sinistre cri. Les états de service de ce militaire réputé pour sa cruauté ont résidé principalement dans les crimes de guerre perpétrés sous son commandement durant la guerre coloniale menée par l’Espagne au Maroc. « Viva la muerte » était le cri de ralliement de tous les obscurantistes fanatiques du régime, qui haïssaient de toutes leurs forces les démocrates, les progressistes et les esprits libres, dont les symboles étaient les villes cosmopolites de Madrid et Barcelone. Aujourd’hui, la réponse la plus convaincante à apporter face aux nouveaux adorateurs de la mort, cette secte qui déteste notre société et son ouverture, c’est de célébrer la vie et d’en faire étalage ! C’est de continuer à fréquenter les événement festifs, les lieux de socialisation, les espaces de rencontre ! C’est d’œuvrer tant à l’émancipation sociale qu’à l’épanouissement individuel ! C’est d’être partie prenante du brassage des cultures. C’est de considérer la diversité comme une richesse. C’est de promouvoir à tous les niveaux toutes les formes de mixité.
La Matrice Europe
Mon article paru dans Lalibre du 14 juillet 2015 sous le titre: « Comment la crise grecque ébranle-t-elle l’Europe » Dans la lutte qu’il incarna de la démocratie contre la « dettocratie », et même dans la défaite qui semble consommée, Alexis Tsipras rappelle la figure de Néo, ce personnage de fiction dont le combat inégal contre la Matrice va permettre progressivement d’en saisir les contours et d’en percevoir la teneur. Dans le film de science-fiction de 1999 réalisé par les frères Wachowski, la réalité est occultée et les humains sont gardés sous contrôle dans un monde virtuel. Il est plaisant de relever que la philosophie de ce chef-d’œuvre populaire du septième art semble inspirée de l’Allégorie de la caverne de Platon : le penseur grec avait déjà imaginé, il y a quelques 25 siècles, cette allégorie de l’humanité enchaînée et incapable de percevoir autre chose que l’ombre de la réalité. Bien sûr, l’analogie est grossière et, prise au premier degré, facilement réfutable. Il suffit d’expliquer que les machines ne dominent pas le monde, et qu’à l’ère des médias de masse, tout le monde a la liberté de s’informer et de poser des choix en connaissance de cause. Il n’empêche que la crise grecque a tout de même eu le mérite de mettre la lumière sur des institutions et des logiques « matricielles ». Aujourd’hui, les citoyens européens dans leur grande majorité sont convaincus de vivre dans un système démocratique. Ils sont un peu moins nombreux à se reconnaître dans les dirigeants qu’ils ont élus et qui les représentent. Et, depuis la crise dite de la dette souveraine à la fin de la première décennie du XXIe siècle, il leur apparaît de plus en plus qu’ils sont exclus d’une part importante de la prise de décision. En effet, les états du sud de la Zone euro ont progressivement été mis sous la tutelle de structures technocratiques, dont la finalité est la stabilité de la monnaie unique. Or celles-ci ne conçoivent le salut de l’euro que par l’application de politiques d’austérité. Des pays comme la Grèce, mais aussi l’Espagne et le Portugal, ploient désormais sous le joug d’un néocolonialisme économique ; c’est aujourd’hui clairement à Bruxelles, Berlin ou Francfort que les centres de décision se trouvent. Beaucoup de choses ont été écrites par des experts plus autorisés que moi sur l’austérité et le fait qu’elle peut être un facteur aggravant de la détérioration de l’économie. Je n’ai pas la prétention d’apporter de nouveaux éléments de réflexion par rapport à l’analyse de différentes sommités comme Krugman ou Stiglitz. Par contre, je tiens à mettre en exergue les douloureux soubresauts causés par l’agonie démocratique vécue par le vieux continent. Les électeurs grecs savent maintenant que s’ils votent Papandreou, Samaras ou Tsipras, ce sera en définitive Djisselbloem, Merkel ou Schaüble qui décideront de leur destinée. Cette assertion est implacable, même si quelques belles âmes pourront s’insurger en disant que les Grecs sont en partie responsables de la situation dramatique de leur pays et qu’il ne tient qu’à eux de sortir de l’euro, s’ils ne veulent pas accepter les « propositions » de la tutelle. Quel démocrate digne de ce nom pourra arguer sérieusement que des choix passés en matière de politiques publiques, choix certes critiquables, justifient la confiscation fût-elle partielle de la souveraineté populaire ? Les faucons de l’Eurogroupe ont-ils voulu également envoyer un signal aux électeurs espagnols ? Leur indiquant que si, en novembre, ils auront bien formellement le choix entre Rajoy, Sanchez et Iglesias, la politique suivie lors de la législature à venir sera celle décidée par Djisselbloem, Merkel et Schaüble. Ce qui se joue en ce moment, c’est peut-être ni plus ni moins que le rétablissement du suffrage censitaire au niveau européen où les voix des électeurs espagnols ou grecs comptent moins que celle des allemands ou des finlandais. Tsipras avait-il le choix ? Non, si l’on considère que l’opinion publique grecque n’était pas prête à accepter une sortie de l’euro. Le gouvernement a tenté de combiner le respect de ses promesses électorales généreuses et le maintien coûte que coûte dans un cadre très étriqué –l’euro-. Le combat était sans doute perdu d’avance. Peut-être aurait-il vraisemblablement dû élargir le champ des possibles en envisageant de sortir du cadre. Mais on touche ici à un des fondements de l’illusion démocratique européenne, une autre partie, assez efficace, de la Matrice. Pendant des années s’est propagée l’idée dans les opinions publiques des états de l’Union Européenne que l’Europe est intrinsèquement porteuse de paix et de développement. Il n’est donc pas évident que les populations soient en capacité de constater que le modèle social européen tant vanté s’est progressivement converti en un paradigme néolibéral européen qui effraie jusqu’aux économistes libéraux des États-Unis, pays souvent considéré comme la référence en matière de capitalisme. On peut d’ailleurs se demander si l’intervention américaine n’a pas été décisive dans l’humiliant« sauvetage » de la Grèce qui se dessine. Obama et son Secrétaire d’État au Trésor, Jack Lew, sont en effet intervenus à plusieurs reprises pour plaider en faveur du maintien de la Grèce dans la Zone euro. Sans doute ne voulaient-ils pas que la Russie, qui avait fait offre de service, prenne la main sur le dossier ? Cette considération nous éloigne du sujet, mais elle met du plomb dans l’aile de ceux qui voient en la construction européenne la perspective de l’émergence d’un contrepoids aux USA… Autre rebord de la Matrice ? Et maintenant ? Cela ne sert à rien d’accabler le gouvernement grec qui, tel le poisson dans la nasse, a essayé de faire bouger les lignes en Europe. Il faudra suivre l’évolution du dossier dans les jours qui viennent et en particulier comprendre si des avancées peuvent être ou ont été engrangées pour ce qui est de la restructuration de la dette, ce qui était la première des priorités de Tsipras. Aujourd’hui il ne s’agit pas de faire le choix entre le nationalisme et l’européisme, car il a été démontré qu’ils sont tous deux franchement compatibles
Pour l’adoption d’un accord de coopération avec la Tunisie
La Tunisie a été violemment touché par un fléau : le terrorisme. Ce pays mérite tout notre soutien. En séance plénière du vendredi 29 mai du Parlement francophone bruxellois, j’interpellais la Ministre Frémault sur la nécessité de passer un accord de coopération avec la Tunisie. Voici sa réponse… INTERPELLATION DE MME CATHERINE MOUREAUX À MME CÉLINE FREMAULT, MINISTRE EN CHARGE DES RELATIONS INTERNATIONALES CONCERNANT L’ADOPTION PAR LA COMMISSION COMMUNAUTAIRE FRANÇAISE D’UN ACCORD DE COOPÉRATION AVEC LA TUNISIE Mme Catherine Moureaux (PS).- La journée du 18 mars 2015 restera gravée dans nos mémoires de femmes, d’hommes, de démocrates et dans l’histoire de nos sociétés comme celle où la folie meurtrière du fanatisme a ouvert un nouveau front dans sa guerre contre la modernité. À cette occasion, nous avons vu 22 innocents, des touristes pour la plupart, tomber de la main d’intégristes, pour être venus admirer les splendeurs de Carthage au Musée du Bardo à Tunis. Cette entreprise mortifère et insensée avait en réalité pour but de punir le peuple tunisien de s’être dressé contre la satrapie et pris ainsi sa liberté. Les femmes et les hommes libres se dressent aujourd’hui en France, en Belgique, en Tunisie et à travers le monde, contre une armée d’esclaves d’une idéologie mortifère qui vomit des fantassins malades dans les rues européennes, africaines ou tunisiennes. Aujourd’hui, on tente de mettre à mal le moral du peuple tunisien en s’attaquant à son histoire et à son économie. Les touristes n’affluent plus à Tunis. Aujourd’hui, chacun d’entre nous, dans son for intérieur, doit se poser la question de savoir si lors de ses prochaines vacances, il ne ferait pas mieux d’aller soutenir ce pays plutôt qu’un autre. Il en a besoin. Notre devoir, Madame la ministre, c’est d’être aujourd’hui aux côtés des Tunisiens et d’apporter tout notre soutien à leurs efforts à surpasser les épreuves auxquelles ils font face. La Fédération Wallonie-Bruxelles et la Région wallonne sont déjà associées à la Tunisie par l’Accord de coopération du 30 septembre 1998. La Commission communautaire française, malgré sa présence dans la délégation de la Fédération Wallonie-Bruxelles qui participe aux travaux de la commission mixte permanente (CMP) instaurée par l’Accord, n’en est pas elle-même signataire. Le site internet de la Commission communautaire française qualifie la coopération entre la Fédération Wallonie-Bruxelles et la Région wallonne d’une part et la Tunisie de l’autre comme ayant des « effets extrêmement positifs ». Une série de gestes forts ont été posés en Fédération Wallonie-Bruxelles et notamment, à la suite des attentats, le vote du 16 mars dernier d’une résolution visant à soutenir la Tunisie dans la consolidation d’un État de droit. En ce qui concerne la situation de la Commission communautaire française, son site web informe qu’il a été proposé à la Tunisie de signer un accord complémentaire avec la Commission communautaire française. Selon la page datée d’avril 2014, cette signature serait en cours. Si on fait une recherche récente, à ma connaissance, nous n’avons pas encore eu à nous prononcer sur un accord de coopération avec la Tunisie. Sur une autre page du site web de la Commission communautaire française, il est aussi mentionné que les associations peuvent entrer « des projets menés à l’initiative des associations bruxelloises et réalisées dans le cadre des accords de coopération signés par la Commission communautaire française, à savoir l’Algérie, le Bénin, la Bulgarie, le Congo, le Liban, le Maroc, les Pays-Bas, la Pologne, le Québec, la Roumanie, le Sénégal, la Tunisie, le Vietnam, la Hongrie, la Croatie et la Turquie ». Nous ne comprenons plus rien… Existe-t-il un accord de coopération, ou pas ? Le statut de notre collaboration avec la Tunisie est assez particulier, et je le regrette. Où en est le processus de signature de l’accord de coopération spécifique entre la Commission communautaire française et la Tunisie ? Quand le texte sera-t-il soumis à notre parlement pour assentiment ? (Applaudissements sur les bancs du groupe PS) Mme la présidente.- La parole est à Mme Fremault. Mme Céline Fremault, ministre.- Comme vous l’avez souligné, le 18 mars a été un jour de chaos et d’horreur pour la Tunisie, avec ce terrible attentant terroriste qui a frappé les visiteurs du musée du Bardo à Tunis. Ce musée, le deuxième plus important du continent africain, était l’ambassadeur des différentes cultures qui ont influencé ce pays. On y trouve ainsi des vestiges de l’Antiquité (grecque, romaine ou carthaginoise) aussi bien que des œuvres majeures de l’art islamique tel le Coran bleu de Kairouan. Le monde a ainsi été plongé dans l’horreur en apprenant la mort de ces 21 innocents, frappés de plein fouet par la barbarie et l’obscurantisme. Nous ne pouvons que nous associer à la douleur des Tunisiens. Comme vous l’avez évoqué, la coopération entre Wallonie-Bruxelles international et la Tunisie ne date pas d’hier. En 1998, un accord de coopération lie les entités fédérées francophone (Fédération Wallonie-Bruxelles et Région wallonne) à la Tunisie. Le partenariat concerne des matières variées telles que la Formation professionnelle, l’Audiovisuel, l’Enseignement supérieur, l’Agriculture, l’Environnement, le Tourisme, l’Education, la Recherche scientifique, la Santé, la Jeunesse… La Commission communautaire française n’avait, à l’époque, pas été associée à la signature de l’accord de coopération. Cela ne l’empêche toutefois pas d’être présente lors des travaux de la Commission mixte permanente. Ainsi, lors de la dernière Commission mixte permanente (CMP), un projet de Bruxelles Formation était repris, en partenariat avec le Centre national de formation de formateurs et d’Ingénierie de formation (CENAFFIF). Le projet visait à améliorer l’apprentissage du français technique et économique par un échange sur l’organisation de l’apprentissage des langues ciblées métiers dans les parcours de formation et sur les techniques et outils d’apprentissage développés à Bruxelles Formation-langues pour l’apprentissage du français. La CMP avec la Tunisie doit se renouveler cette année et il y a fort à parier que certains opérateurs de la Commission communautaire française se manifesteront. À la fin des années 2000, la Commission communautaire française a émis le souhait de devenir, elle aussi, signataire d’un accord de coopération avec la Tunisie. Le régime en place et
Il faut que la région puisse se prononcer sur le CETA !
Le 4 mai, j’interrogeais le Ministre Guy Vanhengel, chargé des relations extérieures, concernant l’Accord économique et commercial global entre l’Union européenne et le Canada (le CETA)… En effet, ce « petit frère » du fameux « TTIP » (le Partenariat Transatlantique entre Union européenne et Canada) représente une claire menace pour les services publics, l’autonomie législative des assemblées parlementaires et en particulier la possibilité de légiférer sur l’environnement ou la fiscalité des entreprises. Certains hauts dirigeants européens aimeraient éviter que les parlements régionaux, pourtant directement concernés, votent sur le texte final de l’accord. Il faut au contraire assurer que les régions puissent se prononcer sur le CETA ! QUESTION ORALE DE MME CATHERINE MOUREAUX À M. GUY VANHENGEL, MINISTRE DU GOUVERNEMENT DE LA RÉGION DE BRUXELLES-CAPITALE, CHARGÉ DES FINANCES, DU BUDGET, DES RELATIONS EXTÉRIEURES ET DE LA COOPÉRATION AU DÉVELOPPEMENT, concernant « la qualification juridique de l’Accord économique et commercial global entre l’Union européenne et le Canada ». Mme Catherine Moureaux (PS).- L’Assemblée nationale française a adopté en novembre 2014 une résolution demandant une révision substantielle du Comprehensive Economic and Trade Agreement (CETA) « considérant le droit souverain des États et de l’Union européenne à mettre en œuvre des politiques publiques, notamment de santé publique, de protection de l’environnement, de protection sociale et de promotion de la diversité culturelle » et « le précédent » que pourrait constituer le CETA par rapport au Transatlantic Trade and Investment Partnership (TTIP). Dans cette résolution, l’Assemblée nationale française demande à la Commission européenne et au Conseil de l’Union européenne « d’affirmer clairement la qualification juridique d’accord mixte de l’accord économique et commercial entre le Canada et l’Union européenne ». La qualification juridique de traité mixte, qui impliquerait que les parlements nationaux et, dans le cas belge, les parlements des entités fédérées, doivent tous ratifier ces traités, n’est en effet absolument pas garantie à l’heure actuelle. La Commission fait pression pour que la ratification ne s’opère que via le Parlement et le Conseil européens. Or le CETA prévoit un grand nombre de mesures qui peuvent avoir un impact direct sur les compétences régionales, par exemple, en matière de régulation environnementale ou de fiscalité des entreprises. Le mécanisme d’arbitrage des différends « investisseurs-États » clause d’arbitrage dite ISDS, constitue un dispositif spécifique qui nécessite une attention toute particulière. La consultation européenne sur ce mécanisme dans le cadre du TTIP a montré une large opposition de la population européenne, ce qui n’a pas empêché la Commission de maintenir inchangé le texte du CETA. Une étude récente publiée notamment par la Fédération syndicale européenne des services publics se consacre à ce dispositif en se basant sur les recours d’entreprises américaines, canadiennes et européennes dans le cadre de la zone de libre-échange d’Amérique du Nord (ALENA). Elle montre parfaitement comment le mécanisme d’arbitrage investisseur-État a été utilisé par ces entreprises pour forcer non seulement le Canada mais aussi ses provinces à modifier la législation notamment en matière de recherche appliquée et de protection de l’environnement. Plus encore, le CETA prévoit que tout le secteur des services soit ouvert au marché, sauf clauses d’exclusions visant à protéger certains services publics qui doivent être explicitement mentionnés par chaque État de l’Union européenne. Les services publics des secteurs de la santé et du social seraient à l’heure actuelle, si l’on en croit plusieurs sommités universitaires européennes – je pense à M. Markus Krajewski, grand juriste en droit du commerce international, professeur de haut niveau de plusieurs grandes universités allemandes et non soupçonnable de gauchisme -, insuffisamment protégés par les clauses d’exclusion. Les impacts sur la Région seront donc, si l’on en croit les experts, loin d’être négligeables. Il est donc crucial de s’assurer que le gouvernement fédéral se fasse le porte-parole efficace pour défendre les services publics belges et poser toutes les balises nécessaires pour éviter un affaiblissement non concerté de la capacité des parlements des entités fédérées à légiférer dans leurs champs de compétences propres. Il semble en particulier dans ce cadre essentiel de garantir la qualification juridique de traité mixte. L’accord tel que négocié mais non encore relu et vérifié par les juristes canadiens ou européens ni remis en forme par eux est néanmoins déjà disponible en ligne. Il est donc possible de se faire une opinion sur la nature du traité. J’en viens à mes questions au gouvernement. Des contacts ont-ils été pris par les autorités régionales avec le gouvernement fédéral sur ce projet d’accord ? Le cas échéant, a-t-on l’assurance que le CETA sera bien débattu par tous les parlements concernés par l’application de ce texte, ce qui implique cette qualification juridique d’accord mixte ? Maintenant que l’accord tel que négocié a été publié, est-ce que les services du gouvernement compétents en la matière ont déjà analysé le contenu et est-ce que le gouvernement a déjà pris position à cet égard ? Guy Vanhengel, ministre.- Dans le cadre des débats menés au sein de cette assemblée sur le TTIP, on a souvent fait référence au CETA. Les débats ont abouti à une résolution, dont le gouvernement examine actuellement la manière d’y donner suite. La définition du caractère mixte d’un traité européen se fait toujours en deux phases : dans un premier temps, au niveau européen, pour savoir si le texte relève entièrement de la compétence de l’Union ou s’il concerne, outre l’Union, ses États membres ; dans un second temps et dans le cas où les États membres sont compétents, également au niveau belge, le groupe de travail traités mixtes, qui fait rapport à la conférence interministérielle de la politique étrangère, définit les entités compétentes dans le cadre d’un traité. Le caractère mixte ou non mixte des traités est également examiné par la section législation du Conseil d’État lorsque celui-ci doit remettre un avis sur un instrument d’approbation. Les textes du CETA qui étaient disponibles à ce moment-là ont été déclarés mixtes provisoirement le 19 novembre 2013 par le groupe de travail traités mixtes. Bien que les entités fédérées de ce pays se dévouent à déclarer un maximum de traités comme mixtes et à les soumettre à leurs parlements respectifs,