Mon article paru dans Lalibre du 14 juillet 2015 sous le titre: « Comment la crise grecque ébranle-t-elle l’Europe » Dans la lutte qu’il incarna de la démocratie contre la « dettocratie », et même dans la défaite qui semble consommée, Alexis Tsipras rappelle la figure de Néo, ce personnage de fiction dont le combat inégal contre la Matrice va permettre progressivement d’en saisir les contours et d’en percevoir la teneur. Dans le film de science-fiction de 1999 réalisé par les frères Wachowski, la réalité est occultée et les humains sont gardés sous contrôle dans un monde virtuel. Il est plaisant de relever que la philosophie de ce chef-d’œuvre populaire du septième art semble inspirée de l’Allégorie de la caverne de Platon : le penseur grec avait déjà imaginé, il y a quelques 25 siècles, cette allégorie de l’humanité enchaînée et incapable de percevoir autre chose que l’ombre de la réalité. Bien sûr, l’analogie est grossière et, prise au premier degré, facilement réfutable. Il suffit d’expliquer que les machines ne dominent pas le monde, et qu’à l’ère des médias de masse, tout le monde a la liberté de s’informer et de poser des choix en connaissance de cause. Il n’empêche que la crise grecque a tout de même eu le mérite de mettre la lumière sur des institutions et des logiques « matricielles ». Aujourd’hui, les citoyens européens dans leur grande majorité sont convaincus de vivre dans un système démocratique. Ils sont un peu moins nombreux à se reconnaître dans les dirigeants qu’ils ont élus et qui les représentent. Et, depuis la crise dite de la dette souveraine à la fin de la première décennie du XXIe siècle, il leur apparaît de plus en plus qu’ils sont exclus d’une part importante de la prise de décision. En effet, les états du sud de la Zone euro ont progressivement été mis sous la tutelle de structures technocratiques, dont la finalité est la stabilité de la monnaie unique. Or celles-ci ne conçoivent le salut de l’euro que par l’application de politiques d’austérité. Des pays comme la Grèce, mais aussi l’Espagne et le Portugal, ploient désormais sous le joug d’un néocolonialisme économique ; c’est aujourd’hui clairement à Bruxelles, Berlin ou Francfort que les centres de décision se trouvent. Beaucoup de choses ont été écrites par des experts plus autorisés que moi sur l’austérité et le fait qu’elle peut être un facteur aggravant de la détérioration de l’économie. Je n’ai pas la prétention d’apporter de nouveaux éléments de réflexion par rapport à l’analyse de différentes sommités comme Krugman ou Stiglitz. Par contre, je tiens à mettre en exergue les douloureux soubresauts causés par l’agonie démocratique vécue par le vieux continent. Les électeurs grecs savent maintenant que s’ils votent Papandreou, Samaras ou Tsipras, ce sera en définitive Djisselbloem, Merkel ou Schaüble qui décideront de leur destinée. Cette assertion est implacable, même si quelques belles âmes pourront s’insurger en disant que les Grecs sont en partie responsables de la situation dramatique de leur pays et qu’il ne tient qu’à eux de sortir de l’euro, s’ils ne veulent pas accepter les « propositions » de la tutelle. Quel démocrate digne de ce nom pourra arguer sérieusement que des choix passés en matière de politiques publiques, choix certes critiquables, justifient la confiscation fût-elle partielle de la souveraineté populaire ? Les faucons de l’Eurogroupe ont-ils voulu également envoyer un signal aux électeurs espagnols ? Leur indiquant que si, en novembre, ils auront bien formellement le choix entre Rajoy, Sanchez et Iglesias, la politique suivie lors de la législature à venir sera celle décidée par Djisselbloem, Merkel et Schaüble. Ce qui se joue en ce moment, c’est peut-être ni plus ni moins que le rétablissement du suffrage censitaire au niveau européen où les voix des électeurs espagnols ou grecs comptent moins que celle des allemands ou des finlandais. Tsipras avait-il le choix ? Non, si l’on considère que l’opinion publique grecque n’était pas prête à accepter une sortie de l’euro. Le gouvernement a tenté de combiner le respect de ses promesses électorales généreuses et le maintien coûte que coûte dans un cadre très étriqué –l’euro-. Le combat était sans doute perdu d’avance. Peut-être aurait-il vraisemblablement dû élargir le champ des possibles en envisageant de sortir du cadre. Mais on touche ici à un des fondements de l’illusion démocratique européenne, une autre partie, assez efficace, de la Matrice. Pendant des années s’est propagée l’idée dans les opinions publiques des états de l’Union Européenne que l’Europe est intrinsèquement porteuse de paix et de développement. Il n’est donc pas évident que les populations soient en capacité de constater que le modèle social européen tant vanté s’est progressivement converti en un paradigme néolibéral européen qui effraie jusqu’aux économistes libéraux des États-Unis, pays souvent considéré comme la référence en matière de capitalisme. On peut d’ailleurs se demander si l’intervention américaine n’a pas été décisive dans l’humiliant« sauvetage » de la Grèce qui se dessine. Obama et son Secrétaire d’État au Trésor, Jack Lew, sont en effet intervenus à plusieurs reprises pour plaider en faveur du maintien de la Grèce dans la Zone euro. Sans doute ne voulaient-ils pas que la Russie, qui avait fait offre de service, prenne la main sur le dossier ? Cette considération nous éloigne du sujet, mais elle met du plomb dans l’aile de ceux qui voient en la construction européenne la perspective de l’émergence d’un contrepoids aux USA… Autre rebord de la Matrice ? Et maintenant ? Cela ne sert à rien d’accabler le gouvernement grec qui, tel le poisson dans la nasse, a essayé de faire bouger les lignes en Europe. Il faudra suivre l’évolution du dossier dans les jours qui viennent et en particulier comprendre si des avancées peuvent être ou ont été engrangées pour ce qui est de la restructuration de la dette, ce qui était la première des priorités de Tsipras. Aujourd’hui il ne s’agit pas de faire le choix entre le nationalisme et l’européisme, car il a été démontré qu’ils sont tous deux franchement compatibles
La zone d’économie urbaine stimulée ou ZEUS, c’est pour quand? – Question du 2 juillet 2015
Mme Catherine Moureaux (PS).- Les Bruxellois établis dans la zone du canal rencontrent pour la plupart une série importante de difficultés d’ordre socio-économique. La discrimination à l’embauche, en particulier, est le quotidien de nombre d’entre eux. Ceux qui connaissent la situation de ces quartiers ont conscience qu’il s’agit là d’un terreau propice à l’émergence d’autres maux en cascade. Le désœuvrement et le manque de perspective pour nos jeunes constituent un véritable fléau pour la Région bruxelloise. Or, on ne peut endiguer la paupérisation qui touche bon nombre d’habitants de cette zone du canal, en particulier les jeunes, si on ne prend pas en considération la problématique de l’accès à l’emploi. Il faut un outil pertinent pour s’y attaquer. À cet égard, le principe de la zone franche urbaine, telle que défini durant la législature écoulée comme zone d’économie urbaine stimulée (ZEUS), aborde par un prisme intéressant la problématique de l’accès à l’emploi. En effet, la ZEUS instaure une forme de régime de discrimination positive dans l’emploi, puisqu’elle établit un lien entre les aides économiques et la lutte ciblée contre le chômage, en privilégiant le recrutement local dans une zone abîmée par le chômage. Conformément à l’accord gouvernemental de cette législature, il revient à l’exécutif régional bruxellois actuel – et à vous en tant que ministre de l’Emploi -, de prendre en charge le développement opérationnel du dispositif. Lors d’une précédente réunion de la commission, en mars, vous aviez déclaré qu’à ce jour, la mise en œuvre de la ZEUS n’était pas encore effective, que vous aviez passé une première phase de prénotification à l’Europe avec ce projet, mais qu’à la suite de cela, vous comptiez revoir l’ordonnance sur l’expansion économique et ses différents arrêtés avant de vous remettre au travail sur la ZEUS. Vous nous déclariez viser le remaniement de l’ordonnance sur l’expansion économique « pour proposer au gouvernement un mécanisme efficient susceptible d’être mis en œuvre dès l’entame de l’année budgétaire 2016 ». Dès lors, quels points de l’ordonnance du 13 décembre 2007 entendez-vous revoir ? Ces modifications sont-elles toujours prévues en vue d’une mise en œuvre début 2016 ? Parallèlement, quel est le calendrier établissant les grandes étapes de la mise en œuvre de la ZEUS ? Enfin, la question de l’effet d’aubaine semblait au cœur de vos préoccupations concernant la mise en œuvre de la zone. Comment avez-vous progressé sur cette question ? À l’heure actuelle, la Région dispose-t-elle d’outils d’évaluation visant à s’assurer que les entreprises bénéficiaires des aides économiques rempliront leurs obligations en matière de recrutement local ? Dans l’affirmative, quels sont ces outils ? Si non, quel est le calendrier de leur élaboration ? M. Didier Gosuin, ministre.– Comme je l’ai annoncé en mars dernier à l’occasion de l’interpellation de Mme Durant, la mise en œuvre de la ZEUS se fera en lien direct avec l’optimalisation des aides existantes, à laquelle je travaille et que j’ai pu évoquer précédemment. Nous réfléchissons à une réforme de ces aides afin de garantir non seulement leur lisibilité, mais également leur cohérence par rapport aux objectifs des politiques économiques en vigueur et aux besoins des entrepreneurs. Le but est évidemment que les aides octroyées par les pouvoirs publics aient de réels effets leviers sur le développement et le dynamisme de l’économie bruxelloise ainsi que sur l’emploi, tout respectant la réglementation européenne sur les aides d’État. Nous souhaitons également supprimer les effets d’aubaine. Pour cela, il est nécessaire de donner la priorité à la création et à la transmission d’entreprises d’une part, et à l’extension des services et produits d’autre part. Il est également possible d’intégrer des critères d’emploi en tenant compte de la réglementation européenne sur les aides d’État. Comme vous le mentionnez, la zone du canal rencontre des difficultés socioéconomiques sérieuses, mais offre aussi des opportunités de développement conséquentes, grâce notamment à la présence d’un tissu industriel et à d’importantes capacités d’accueil et d’hébergement d’activités. C’est pourquoi – sans attendre les conclusions de la remise à plat des aides à l’expansion économique et les nécessaires adaptations réglementaires qu’elle engendrera -, il m’a semblé dans l’intérêt des entreprises bruxelloises, situées dans la zone du canal, qui réalisent des investissements contribuant à l’emploi et au dynamisme économique de cet espace, et donc aussi de la Région, de déjà pouvoir bénéficier de taux d’aide majorés, en activant la zone de développement. C’est chose faite depuis le 1er juin dernier, date à laquelle la mesure est entrée en vigueur. La zone de développement a été définie notamment sur la base du taux de chômage important du périmètre en question et concerne le territoire du canal, ainsi que les communes d’Anderlecht, de Molenbeek-Saint-Jean, de Forest et la Ville de Bruxelles. Concrètement, le mécanisme permet de majorer les aides à l’investissement jusqu’à deux fois les montants admissibles en dehors de la zone. La couverture géographique de la ZEUS est nettement plus restreinte que celle de la zone de développement. La ZEUS permet cependant d’augmenter les aides liées à l’embauche. Il s’agit en cela d’un outil de discrimination positive, destiné à soutenir les entreprises qui favorisent l’emploi de proximité dans des quartiers où l’exclusion sociale est un risque majeur. Il s’agit d’un mécanisme dérogatoire aux principes européens d’aides d’État et de libre circulation des travailleurs, pouvant être accordé si les mesures proposées : – atteignent un objectif communautaire ; – sont nécessaires et proportionnées ; – n’altèrent pas les conditions d’échanges contraires à l’intérêt commun ; – sont limitées dans le temps (maximum cinq ans) ; – sont évaluées annuellement et ciblent une zone déterminée sur la base de critères objectifs. Vous l’avez compris, il s’agit d’un mécanisme complexe, qui vient en complément de dispositifs existants, à commencer par ceux de la zone de développement. Comme j’avais pu l’annoncer en mars dernier, c’est dans le cadre de la révision de l’ordonnance sur l’expansion économique et de ses différents arrêtés que j’envisage d’effectuer les travaux de mise en place de la ZEUS. Mesurant la complexité du chantier, je ne veux pas m’enfermer à ce stade dans
Quel est l’état d’avancement du volet qualitatif des dispositifs articles 60 et 61? – question du 2 juillet 2015
Mme Catherine Moureaux (PS).- Le 4 juin dernier, je vous interpellais déjà sur les dispositifs articles 60 et 61, en me basant sur l’avis du Conseil économique et social de la Région de Bruxelles-Capitale du 24 avril 2014 relatif à la régionalisation des programmes d’accompagnement visant à réinsérer les bénéficiaires du revenu d’intégration sociale et de l’aide sociale équivalente. Celui-ci indique que « la mise à disposition devrait être mieux encadrée, notamment lors de : – la mise à disposition de travailleurs dans des sociétés commerciales dans le cadre de marchés publics de nettoyage de bâtiments publics ; – la mise à disposition des artistes ; – la substitution d’emplois durables, notamment dans certains services communaux ». Un peu plus loin : « Pour les partenaires sociaux, il est donc nécessaire d’instaurer des balises pour mieux encadrer la mise à disposition en externe chez un employeur privé des art. 60, §7 ». Je me basais également sur l’accord du gouvernement qui le mentionne explicitement. Avez-vous avancé sur ce point ? Les modalités concrètes de l’encadrement par Actiris du volet qualitatif des dispositifs articles 60 et 61 sont-elles déjà établies ? Le cas échéant, quelles sont-elles ? M. Didier Gosuin, ministre.- Oui, le gouvernement a conclu. Les budgets des dispositifs articles 60 et 61 ont été transférés à Actiris, après l’adoption d’un projet d’avenant au contrat de gestion confiant une mission déléguée dont l’objet est d’assurer le suivi de la mesure, qui reste confiée opérationnellement aux CPAS. Ce projet d’avenant a été proposé par le gouvernement au comité de gestion d’Actiris, qui s’est réuni aujourd’hui, le 2 juillet, et l’a approuvé. Le problème est donc réglé sur le plan administratif. Pour votre information, parallèlement à ce projet d’avenant, le gouvernement a déjà pris certaines dispositions. Ainsi, pour chaque nouveau poste à partir du 1er janvier 2016, le dossier devra disposer préalablement à l’entrée en fonction du travailleur : – d’un descriptif de fonction spécifique ; – d’une convention de mise à disposition individuelle précisant les obligations des parties (CPAS, utilisateur, travailleurs) ; – d’une convention d’insertion professionnelle prévoyant un projet d’acquisition de compétences (théoriques, pratiques et/ou sociales) et d’accompagnement durant le contrat de travail, chaque projet d’acquisition étant envisagé dans la perspective d’une validation des compétences. Les aspects d’acquisition de compétences devront être convenus entre les représentants des CPAS, d’Actiris, du Vlaamse Dienst voor Arbeidsbemiddeling en Beroepsopleiding (VDAB) et de Bruxelles-Formation, afin d’assurer la cohérence avec les politiques d’emploi et de formation en œuvre au sein de la Région de Bruxelles-Capitale. Le gouvernement organisera un lieu de concertation à cet égard. Le travail sur le volet qualitatif vise à exécuter la décision d’harmoniser les pratiques entre les CPAS, comme prévu dans la déclaration de politique régionale. Maintenant que le comité de gestion a accepté le projet d’avenant, Actiris devrait nous présenter incessamment des propositions de mise en œuvre. Mme Catherine Moureaux (PS).– Ces réponses sont encourageantes. Avez-vous déjà une idée de la manière dont vous allez organiser la concertation entre les acteurs, notamment avec les CPAS ? M. Didier Gosuin, ministre.- Un travail important doit d’abord être réalisé avec les travailleurs sociaux des CPAS, afin qu’ils intègrent cette notion de volet qualitatif. Même si je ne veux pas généraliser à tous les CPAS, je ne veux plus que l’article 60 soit simplement le mécanisme de renvoi à l’expéditeur : la sécurité sociale nous renvoie quelqu’un qui est passé à travers les mailles du filet, on lui accorde un emploi dans le cadre de l’article 60 et on le renvoie dans les filets de la sécurité sociale. Il faut un accompagnement, voire un volet de formation et de validation des compétences, mais cela implique un changement dans le travail des assistants sociaux, qui en seront informés très concrètement, notamment par le service de validation des compétences ou son pendant néerlandophone. Ensuite, une concertation aura lieu avec les responsables politiques, dont les présidents de CPAS, afin de leur dire combien l’article 60 est un très bon instrument d’insertion dès lors qu’il s’inscrit dans une vision globale d’accompagnement et de validation des compétences. Si les communes sont prêtes à jouer le jeu, elles y trouveront probablement des opportunités et le gouvernement les aidera. Ma volonté sera d’accroître les moyens mis à la disposition des CPAS afin d’augmenter le nombre d’emplois article 60. Toutefois, je ne veux pas d’emblée relever ce nombre pour « faire de l’occupationnel » car, si cela se passe très bien dans certains cas, dans d’autres, on ne fait qu’occuper le travailleur sans considérer la plus-value que pourrait avoir la compétence acquise. Il s’agit d’un changement de mentalité à insuffler, mais avec à la clé un instrument important pour les communes et les CPAS prêts à entrer dans cette logique qualitative. Mme Catherine Moureaux (PS).- Je suis globalement satisfaite de votre réponse. Je vous poserais néanmoins une dernière question. Vous disiez qu’il nous faudra travailler avec les travailleurs sociaux et que le gouvernement aidera par la suite les communes et les CPAS en fonction des besoins et des projets proposés. À vos yeux, cette aide passera par une augmentation du nombre des emplois article 60. Cela revient donc à apporter une aide aux usagers du dispositif. Ne conviendrait-il pas plutôt d’aider directement les travailleurs sociaux ?
Pour l’intégration de la dimension de genre dans la réforme des pensions
Carte blanche publiée dans le Soir du 23 juin 2015, à l’initiative d’un collectif de députées socialistes(*) dont je fais partie… Des mandataires socialistes des différentes assemblées régionales et fédérale s’adressent au gouvernement dans le cadre de la réforme des pensions et lui demandent de remédier aux inégalités entre femmes et hommes pensionnés. Ce lundi, les partis de l’opposition au fédéral se sont opposés à la tentative de passage en force de la réforme des pensions voulue par le gouvernement Michel. Le même jour, le Conseil d’Etat émettait un très sévère avertissement sur ce projet de réforme dont la conformité avec les lois et la Constitution belges est plus que contestée Face à cette actualité, Le Soir publiait hier un dossier consacré aux conséquences de cette réforme , mais un enjeu crucial a été éludé du débat : l’impact de cette réforme des pensions sur les femmes. Le Conseil d’Etat a mis en garde le gouvernement contre une possible rupture de l’égalité entre les belges et l’on sait que les pensions de femmes sont un des révélateurs les plus criants des rapports sociaux et de genre encore très inégalitaires dans notre pays. C’est pourquoi, nous, femmes et députées socialistes de différentes assemblées, tenons à remettre cette question au centre du débat et appelons le gouvernement à prendre en compte la dimension de genre dans sa réforme, faute de quoi, les inégalités entre hommes et femmes ne feraient que s’accentuer. En Belgique, en 2015, cette perspective est inacceptable. Des inégalités déjà présentes… Le régime des pensions en Belgique est constitué de trois piliers : la pension légale, les pensions complémentaires (2e pilier) et l’épargne pension individuelle. Les femmes sont les premières victimes des inégalités liées à ce système. Le premier pilier, celui de la pension de retraite, montre que la pension des femmes est nettement plus basse que celle des hommes : 698 euros brut/mois en moyenne pour une femme isolée contre 953 euros brut/mois (1) pour un homme dans la même situation. Par ailleurs, elles sont nombreuses à travailler dans des secteurs « pauvres » qui n’offrent pas de 2e pilier (les secteurs sociaux, les soins de santé, les petits commerces, etc.). Enfin, n’oublions pas la différence de salaire existant entre hommes et femmes tous secteurs confondus, qui s’élève encore à 20% qui les empêche bien souvent de se constituer une épargne individuelle ! …Qui se creuseront davantage avec la nouvelle réforme Le durcissement de l’accès à la pension anticipée prévu dans l’accord de gouvernement Michel Ier prévoit une augmentation de l’âge minimum et de la condition de carrière. Ainsi d’ici l’horizon 2019, il faudra avoir travaillé 44 ans pour pouvoir partir en pension anticipée à 60 ans, autrement dit avoir travaillé sans discontinuité depuis ses 16 ans. Si tel n’est pas le cas, il faudra attendre 63 ans, à condition d’avoir une carrière de 42 ans. Les femmes, qui ont plus souvent arrêté de travailler pendant quelques années, souvent pour élever leurs enfants en bas âge, seront d’autant plus touchées par cette mesure. En pratique, elles seront très nombreuses à devoir travailler jusqu’à l’âge légal de 67 ans en 2030. Ainsi, 53,51% des femmes salariées et 82,39% des femmes indépendantes devront travailler jusqu’à 67 ans, faute d’une carrière suffisante pour prendre leur pension plus tôt (2). Le gouvernement a également appliqué depuis le 1er janvier 2015 la suppression de l’indemnisation du crédit-temps sans motif et le contrôle durci des motifs désormais autorisés (congé parental, congés pour soins palliatifs et assistance à une personne gravement malade). Les femmes qui étaient plus nombreuses à y avoir recours pour prendre soin d’un proche ne pourront plus comptabiliser ce crédit-temps dans le calcul de leur pension. Même si nous souhaitons ardemment que celles-ci appartiennent au passé, il est primordial de prendre en compte les réalités inhérentes aux rôles sociaux stéréotypés des femmes et des hommes. Ceci est une priorité à laquelle le gouvernement doit s’attacher sous peine d’accroitre davantage les disparités déjà existantes entre hommes et femmes face à la pension et pire, de plonger de nombreuses femmes sous le seuil de pauvreté. A l’instar du Conseil de l’Egalité des Chances entre les Hommes et les Femmes, nous regrettons qu’aucune analyse n’ait été produite sur l’impact de la réforme des pensions sur les femmes salariées (3). Ceci est d’autant plus interpellant qu’en 2007, une loi visant à l’intégration de la dimension du genre dans l’ensemble des politiques fédérales a été votée (4). C’est pourquoi, nous, femmes et députées PS de différentes assemblées, demandons au gouvernement d’apporter une attention toute particulière à la dimension de genre dans sa réforme des pensions. Nous soutenons les revendications des associations féministes (5) et nous lui demandons: – Une meilleure prise en compte des périodes de travail à temps partiel dans le calcul de la pension – Le maintien des périodes de crédit-temps sans motif dans ce calcul – Le renforcement du 1er pilier, à savoir la pension légale. – La fin de toutes les mesures qui favorisent le couple à un seul revenu. – La fin de toutes les mesures qui favorisent le travail à temps partiel. – L’individualisation des droits sociaux. – Enfin, nous lui demandons de consulter le Conseil de l’Egalité des Chances entre les Hommes et les Femmes avant l’adoption en dernière lecture de la réforme des pensions. (1) ONP, statistiques annuelles 2013. (2) Chiffres communiqués par le ministre des Pensions suite à une question écrite de Frédéric Daerden le 15/12/2014. (3) Avis n°147 du Conseil de l’Egalité entre les Hommes et les Femmes du 29 mai 2015. (4) Loi du 12 janvier 2007 visant au contrôle de l’application des résolutions de la conférence mondiale sur les femmes réunie à Pékin en septembre 1995 et intégrant la dimension du genre dans l’ensemble des politiques fédérales. (5) Ces revendications ont été avancées par les Femmes Prévoyantes Socialistes et plus largement par la Plateforme Féministe Socio-Economique qui dénonce l’impact des mesures d’austérité sur les femmes. (*) Signataires : Véronique Bonni, députée à la Région wallone
Profils des usagers de certains dispositifs des CPAS : ping-pong entre Céline Frémault et Didier Gosuin
Quelles sont les conséquences des exclusions du chômage sur les dispositifs du CPAS tel quel « l’article 60 »? Une question qui s’invite d’elle-même surtout quand on sait que ce dispositif d’insertion socioprofessionnelle « article 60 » a pour visée de favoriser la mise à l’emploi via une immersion professionnelle ; ce qui permet du coup aux personnes, qui émargent au CPAS, de recouvrer leur allocation de chômage. Afin d’obtenir une réponse à ma question, j’ai déposé deux interpellations, l’une en commission des affaires sociales du 06/05/2015 et l’autre lors de la commission des affaires économiques du 04/06/2015. Et pourtant, je n’ai toujours pas de réponse à ma question ! Mais je reviendrai à la charge et vous pourrez suivre la suite de ce (mauvais) feuilleton! Je vous donne rendez-vous sur mon site ! INTERPELLATION DE MME CATHERINE MOUREAUX À M. PASCAL SMET, MEMBRE DU COLLÈGE RÉUNI, COMPÉTENT POUR LA POLITIQUE D’AIDE AUX PERSONNES, LES PRESTATIONS FAMILIALES ET LE CONTRÔLE DES FILMS, ET À MME CÉLINE FREMAULT, MEMBRE DU COLLÈGE RÉUNI, COMPÉTENTE POUR LA POLITIQUE D’AIDE AUX PERSONNES, LES PRESTATIONS FAMILIALES ET LE CONTRÔLE DES FILMS, concernant « la prise en charge des usagers infraqualifiés dans les dispositifs d’insertion socioprofessionnelle des CPAS ». Mme Catherine Moureaux (PS).- Nous avons déjà évoqué l’impact des exclusions de chômage survenues le 1er janvier 2015 sur les centres publics d’action sociale (CPAS) par le transfert de charges financières. Mais nous n’avons jamais interrogé l’impact de ces mesures sur les dispositifs internes des CPAS, et en particulier la politique d’insertion socioprofessionnelle du dispositif des contrats articles 60 et apparentés. Plusieurs CPAS ont d’ores et déjà activé des articles 60 §7 pour des personnes diplômées qui ont été exclues du chômage suite à la suppression de leurs allocations d’insertion. À l’origine, outre le recouvrement du droit au chômage, les dispositifs des articles 60 §7 et 61 ont été créés pour servir de première expérience professionnelle pour des personnes particulièrement fragilisées. Si ces postes sont utilisés aujourd’hui pour un public qualifié, très différent du public originellement visé, les personnes particulièrement fragilisées pourraient se voir, à terme, exclues du dispositif. Plus encore, la mise à disposition d’articles 60 §7 pour les diplômés peut renforcer le mécanisme de substitution qui est un effet pervers de la mesure décrit dans plusieurs études. Les dispositifs de type articles 60 §7 contribueraient en effet à faire disparaître des postes nécessitant peu de qualifications. Aujourd’hui, ce sont des postes qualifiés dans certaines administrations et associations qui peuvent être menacés par l’arrivée de ces nouveaux profils dans le dispositif. Dans son avis du 24 avril 2014, le Conseil économique et social de la Région de Bruxelles-Capitale souligne que, dans le cas d’une mise à disposition des articles 60 §7, « rien n’oblige l’employeur à appliquer les conditions en vigueur dans le secteur dans lequel le travailleur est mis à disposition. C’est à ce niveau que réside le risque de concurrence entre CPAS ainsi qu’entre travailleurs ». Il incite en outre explicitement les autorités régionales à un encadrement de la mise à disposition. Des contacts ont-ils été pris en vue d’une évaluation précise des impacts des « nouvelles arrivées » dans les CPAS sur les différentes mesures de mise à l’emploi comme les articles 60 §7 et 61 ? Quelles initiatives ont-elles été prises par le gouvernement pour éviter les effets de substitution, en particulier en cas de mise à disposition ? Mme Céline Fremault, membre du Collège réuni.- L’article 60 §7, de la loi organique des CPAS prévoit que, lorsqu’une personne doit justifier d’une période de travail pour obtenir le bénéfice complet de certaines allocations sociales ou afin de favoriser l’expérience professionnelle de l’intéressé, le CPAS prend toutes dispositions de nature à lui procurer un emploi : – soit le CPAS engage lui-même la personne et la fait travailler dans un de ses services (article 60 §7, alinéa 1) ; – soit le CPAS engage la personne et la met ensuite à la disposition d’un tiers utilisateur (alinéa 2) qui peut être une commune, une asbl, une intercommunale à but social, culturel ou écologique, une société à finalité sociale ou tout partenaire qui a conclu une convention avec le CPAS ; – soit le CPAS signe une convention avec un employeur extérieur (article 61). Ce système par lequel un CPAS intervient financièrement dans les frais d’insertion professionnelle d’un ayant droit à l’intégration sociale ou à une aide sociale financière a été conçu comme le pendant du système d’activation applicable dans la réglementation du chômage. Le CPAS peut aussi intervenir financièrement dans le coût salarial du travailleur, dans le cadre de plusieurs programmes de mise à l’emploi. Les CPAS sont depuis toujours confrontés à des demandes de mise à l’emploi de leurs usagers. À noter d’ailleurs qu’il appartient à ces derniers de montrer leur disposition au travail, en exécution de l’article 5 de la loi du 26 mai 2002 concernant le droit à l’intégration sociale, pour pouvoir bénéficier du revenu d’intégration sociale (RIS) quelle que soit leur qualification. La mise à l’emploi est un élément de preuve. On pourrait évidemment distinguer les usagers diplômés, généralement moins nombreux, des demandeurs d’aide moins qualifiés. Cependant, dans la mesure où ils accèdent à l’aide des CPAS, ils font tous partie d’une frange de public potentiellement très fragilisé, que les CPAS ont pour mission d’aider. L’insertion par l’article 60 §7 ou 61 n’est d’ailleurs pas seulement une insertion professionnelle mais aussi sociale. À ce titre, une expérience professionnelle peut aider les personnes concernées à sortir de l’exclusion. Pour ce qui concerne l’évaluation de l’impact des exclusions du chômage, l’étude d’évaluation menée sur l’intervention de mon collègue Didier Gosuin atteste d’une augmentation de la population aidée depuis le 1er janvier 2015. Bien que différente de CPAS à CPAS, celle-ci est globalement nettement inférieure aux pronostics alarmants. Lors d’un précédent débat sur le sujet, nous avons eu l’occasion de pointer plusieurs explications possibles à ces chiffres : le fait qu’une partie des personnes concernées est occulte et qu’une autre partie aurait besoin d’un certain temps pour prendre conscience de son changement de
Il faut que la région puisse se prononcer sur le CETA !
Le 4 mai, j’interrogeais le Ministre Guy Vanhengel, chargé des relations extérieures, concernant l’Accord économique et commercial global entre l’Union européenne et le Canada (le CETA)… En effet, ce « petit frère » du fameux « TTIP » (le Partenariat Transatlantique entre Union européenne et Canada) représente une claire menace pour les services publics, l’autonomie législative des assemblées parlementaires et en particulier la possibilité de légiférer sur l’environnement ou la fiscalité des entreprises. Certains hauts dirigeants européens aimeraient éviter que les parlements régionaux, pourtant directement concernés, votent sur le texte final de l’accord. Il faut au contraire assurer que les régions puissent se prononcer sur le CETA ! QUESTION ORALE DE MME CATHERINE MOUREAUX À M. GUY VANHENGEL, MINISTRE DU GOUVERNEMENT DE LA RÉGION DE BRUXELLES-CAPITALE, CHARGÉ DES FINANCES, DU BUDGET, DES RELATIONS EXTÉRIEURES ET DE LA COOPÉRATION AU DÉVELOPPEMENT, concernant « la qualification juridique de l’Accord économique et commercial global entre l’Union européenne et le Canada ». Mme Catherine Moureaux (PS).- L’Assemblée nationale française a adopté en novembre 2014 une résolution demandant une révision substantielle du Comprehensive Economic and Trade Agreement (CETA) « considérant le droit souverain des États et de l’Union européenne à mettre en œuvre des politiques publiques, notamment de santé publique, de protection de l’environnement, de protection sociale et de promotion de la diversité culturelle » et « le précédent » que pourrait constituer le CETA par rapport au Transatlantic Trade and Investment Partnership (TTIP). Dans cette résolution, l’Assemblée nationale française demande à la Commission européenne et au Conseil de l’Union européenne « d’affirmer clairement la qualification juridique d’accord mixte de l’accord économique et commercial entre le Canada et l’Union européenne ». La qualification juridique de traité mixte, qui impliquerait que les parlements nationaux et, dans le cas belge, les parlements des entités fédérées, doivent tous ratifier ces traités, n’est en effet absolument pas garantie à l’heure actuelle. La Commission fait pression pour que la ratification ne s’opère que via le Parlement et le Conseil européens. Or le CETA prévoit un grand nombre de mesures qui peuvent avoir un impact direct sur les compétences régionales, par exemple, en matière de régulation environnementale ou de fiscalité des entreprises. Le mécanisme d’arbitrage des différends « investisseurs-États » clause d’arbitrage dite ISDS, constitue un dispositif spécifique qui nécessite une attention toute particulière. La consultation européenne sur ce mécanisme dans le cadre du TTIP a montré une large opposition de la population européenne, ce qui n’a pas empêché la Commission de maintenir inchangé le texte du CETA. Une étude récente publiée notamment par la Fédération syndicale européenne des services publics se consacre à ce dispositif en se basant sur les recours d’entreprises américaines, canadiennes et européennes dans le cadre de la zone de libre-échange d’Amérique du Nord (ALENA). Elle montre parfaitement comment le mécanisme d’arbitrage investisseur-État a été utilisé par ces entreprises pour forcer non seulement le Canada mais aussi ses provinces à modifier la législation notamment en matière de recherche appliquée et de protection de l’environnement. Plus encore, le CETA prévoit que tout le secteur des services soit ouvert au marché, sauf clauses d’exclusions visant à protéger certains services publics qui doivent être explicitement mentionnés par chaque État de l’Union européenne. Les services publics des secteurs de la santé et du social seraient à l’heure actuelle, si l’on en croit plusieurs sommités universitaires européennes – je pense à M. Markus Krajewski, grand juriste en droit du commerce international, professeur de haut niveau de plusieurs grandes universités allemandes et non soupçonnable de gauchisme -, insuffisamment protégés par les clauses d’exclusion. Les impacts sur la Région seront donc, si l’on en croit les experts, loin d’être négligeables. Il est donc crucial de s’assurer que le gouvernement fédéral se fasse le porte-parole efficace pour défendre les services publics belges et poser toutes les balises nécessaires pour éviter un affaiblissement non concerté de la capacité des parlements des entités fédérées à légiférer dans leurs champs de compétences propres. Il semble en particulier dans ce cadre essentiel de garantir la qualification juridique de traité mixte. L’accord tel que négocié mais non encore relu et vérifié par les juristes canadiens ou européens ni remis en forme par eux est néanmoins déjà disponible en ligne. Il est donc possible de se faire une opinion sur la nature du traité. J’en viens à mes questions au gouvernement. Des contacts ont-ils été pris par les autorités régionales avec le gouvernement fédéral sur ce projet d’accord ? Le cas échéant, a-t-on l’assurance que le CETA sera bien débattu par tous les parlements concernés par l’application de ce texte, ce qui implique cette qualification juridique d’accord mixte ? Maintenant que l’accord tel que négocié a été publié, est-ce que les services du gouvernement compétents en la matière ont déjà analysé le contenu et est-ce que le gouvernement a déjà pris position à cet égard ? Guy Vanhengel, ministre.- Dans le cadre des débats menés au sein de cette assemblée sur le TTIP, on a souvent fait référence au CETA. Les débats ont abouti à une résolution, dont le gouvernement examine actuellement la manière d’y donner suite. La définition du caractère mixte d’un traité européen se fait toujours en deux phases : dans un premier temps, au niveau européen, pour savoir si le texte relève entièrement de la compétence de l’Union ou s’il concerne, outre l’Union, ses États membres ; dans un second temps et dans le cas où les États membres sont compétents, également au niveau belge, le groupe de travail traités mixtes, qui fait rapport à la conférence interministérielle de la politique étrangère, définit les entités compétentes dans le cadre d’un traité. Le caractère mixte ou non mixte des traités est également examiné par la section législation du Conseil d’État lorsque celui-ci doit remettre un avis sur un instrument d’approbation. Les textes du CETA qui étaient disponibles à ce moment-là ont été déclarés mixtes provisoirement le 19 novembre 2013 par le groupe de travail traités mixtes. Bien que les entités fédérées de ce pays se dévouent à déclarer un maximum de traités comme mixtes et à les soumettre à leurs parlements respectifs,
Appel à projets « Housing first » et lutte contre le sans-abrisme
Comment lutter contre le sans-abrisme ? Le 6 mai, j’interpellais (conjointement avec plusieurs députés, dont Jamal Ikazban et Véronique Jamoulle) la Ministre Céline Frémault sur un outil concret de la lutte contre le sans-abrisme : les projets dits « housing first » – logement d’abord. Le compte-rendu intégral des débats est disponible (en pdf) en cliquant ici. INTERPELLATION DE MME CATHERINE MOUREAUX À M. PASCAL SMET, MEMBRE DU COLLÈGE RÉUNI, COMPÉTENT POUR LA POLITIQUE D’AIDE AUX PERSONNES, LES PRESTATIONS FAMILIALES ET LE CONTRÔLE DES FILMS, ET À MME CÉLINE FREMAULT, MEMBRE DU COLLÈGE RÉUNI, COMPÉTENTE POUR LA POLITIQUE D’AIDE AUX PERSONNES, LES PRESTATIONS FAMILIALES ET LE CONTRÔLE DES FILMS, concernant « les projets désignés dans le cadre de l’appel à projets Housing First » Mme Catherine Moureaux (PS).- Vous avez lancé l’appel à projets Housing First, dont les candidatures devaient être rentrées pour le 9 mars. Son objectif est d’implanter de façon intégrée des projets Housing First à Bruxelles en faveur de publics sans abri, en tenant compte de la réalité de la Région Bruxelles-Capitale. Rappelons que l’approche Housing First, signifiant « logement d’abord », consiste à prendre le logement comme point de départ de la reconstruction des personnes sans abri, par opposition aux approches de réinsertion dans l’habitation par étapes successives, dans une logique de continuum de soins. Dans cette perspective, l’objectif à long terme de l’appel à projets vise la réduction du sans-abrisme en Région de Bruxelles-Capitale et l’intégration des publics sans abri dans la société grâce à l’accès à un logement stable et immédiat, couplé à un accompagnement social intense et individualisé. Il s’agit donc de développer le modèle traditionnel du Housing First, basé sur une approche multidisciplinaire d’accompagnement psychosocial. Vous avez rendu publique ce jeudi 26 mars votre décision de désigner deux projets, qui concernent un total de 47 personnes en 2015. Ils devaient débuter dès le 1er avril. En réponse à une question d’actualité posée lors de la séance plénière de l’Assemblée réunie de la Commission communautaire commune de ce vendredi 27 mars, vous avez d’ailleurs indiqué que deux réseaux pluridisciplinaires étaient désignés. Le premier est conduit par le Forum bruxellois de lutte contre la pauvreté, regroupant les centres publics d’action sociale de Forest, de Molenbeek-Saint-Jean, de Saint-Gilles, de Saint-Josse et de Schaerbeek, l’asbl Santé mentale et exclusion sociale (SMES), l’Association des maisons d’accueil et des services d’aide aux sans-abri (AMA), la Fédération des maisons médicales, la Fédération des services de santé mentale bruxellois (FSSMB), la Fédération bruxelloise des institutions pour toxicomanes (Fedito), la Ligue bruxelloise pour la santé mentale, le Service d’accompagnement social des locataires sociaux de la Région de Bruxelles-Capitale (SASLS), le Centre d’appui au secteur bruxellois d’aide aux sans-abri (La Strada) et enfin, le SAMU social. Ce projet, d’un montant de 300.000 euros, prévoit d’accompagner 32 personnes. Il vise un public de sans domicile fixe « chronicisés ». Le second réseau est conduit par le centre public d’action sociale de la Ville de Bruxelles, le SAMU Social, le Centre hospitalier universitaire Saint-Pierre et l’asbl Jamais sans toit, pour un montant de 140.000 euros. Il vise un public plus jeune et plus féminin sur le territoire de la Ville de Bruxelles. Pourriez-vous nous transmettre les deux projets ? Mme Céline Fremault, membre du Collège réuni.- Oui. Mme Catherine Moureaux (PS).– Merci. Le modèle montréalais étudié par les premiers soumissionnaires présentait le grand avantage de bénéficier d’un suivi réalisé par des chercheurs du Centre de recherche de Montréal sur les inégalités sociales, les discriminations et les pratiques alternatives de citoyenneté (Cremis) et de l’université anglophone de Montréal. Cette approche, qui associe aspects opérationnels et protocole d’évaluation, permettait un examen continu du projet, notamment par le biais d’entretiens avec les personnes accompagnées. C’est donc un volet à part entière. Les deux projets que vous avez sélectionnés ont-ils adopté cette méthodologie d’évaluation continue ? Comment se déclinent leurs procédures d’évaluation ? Le Forum de lutte contre la pauvreté a introduit une demande conjointe à la Fondation Roi Baudouin. En connaissez-vous l’issue ? Au besoin, les financements pour un suivi sont-ils dégagés ? Vous évoquez une évaluation hivernale dès décembre 2015. Comment l’envisagez-vous ? Qu’avez-vous déjà mis en place pour atteindre votre objectif d’aboutir à un seul projet regroupant tous les opérateurs à l’horizon 2016 ? (…) Mme Céline Fremault, membre du Collège réuni – (…) En ce qui concerne les questions relatives aux programmes Housing First, je voudrais apporter les précisions suivantes. Tout d’abord, il est effectivement indispensable que ces nouveaux programmes fassent l’objet d’une évaluation méticuleuse et continue. C’est seulement ainsi que nous pourrons amener les correctifs nécessaires dès le renouvellement des programmes en janvier 2016. Nous avons l’intention de stabiliser et de renforcer progressivement les projets Housing First au cours de ces prochaines années. Par ailleurs, il est prévu que les deux programmes convergent vers une coordination de projet unique dans le même esprit que celui décrit pour le plan intégré de lutte contre le sans-abrisme. Pour répondre à la question de Mme Moureaux, nous connaissons très bien l’évaluation faite à Montréal par le Centre de recherche de Montréal sur les inégalités sociales et les discriminations (Cremis) et c’est exactement selon cette base que nous comptons orienter l’évaluation bruxelloise. Sur ma suggestion, le Forum bruxellois de lutte contre la pauvreté, qui est par ailleurs en charge de l’évaluation des projets financés par le niveau fédéral, a rencontré la Fondation Roi Baudouin afin que celle-ci finance une partie importante du dispositif évaluatif. L’objectif est d’évaluer les programmes Housing First en tant qu’exemples d’innovation sociale et de mettre en place des outils pour assurer la diffusion de leurs contenus auprès des différents secteurs bruxellois concernés ou en attente. Quant à La Strada, elle assurera l’évaluation quantitative et économique (c’est-à-dire les coûts par individu et par programme) et analysera les parcours individuels des bénéficiaires des programmes. En ce qui concerne le public auquel les programmes sont destinés, la question a fait l’objet d’une longue réflexion. Elle est toujours la même : est-ce que Housing First est un outil qui fonctionne uniquement pour
Campagne régionale de sensibilisation à l’égard des entreprises contre les discriminations
À Bruxelles, les discriminations à l’emploi sont une réalité quotidienne pour de nombreux travailleurs. Ce constat doit amener des mesures renforcées ! Et les entreprises doivent y prendre leur part. C’est à ce propos que ce 27 avril, j’ai interrogé Bianca Debaets, secrétaire d’État à l’Égalité des Chances sur la lutte contre les discriminations dans le cadre du travail et sur les actions de sensibilisation menées à l’égard des entreprises. QUESTION ORALE DE MME CATHERINE MOUREAUX À MME BIANCA DEBAETS, SECRÉTAIRE D’ÉTAT À LA RÉGION DE BRUXELLES-CAPITALE, CHARGÉE DE LA COOPÉRATION AU DÉVELOPPEMENT, DE LA SÉCURITÉ ROUTIÈRE, DE L’INFORMATIQUE RÉGIONALE ET COMMUNALE ET DE LA TRANSITION NUMÉRIQUE, DE L’ÉGALITÉ DES CHANCES ET DU BIEN-ÊTRE ANIMAL, concernant « la campagne de sensibilisation à l’égard des entreprises contre les discriminations ». Mme Catherine Moureaux (PS).- Le 10 novembre dernier, je vous interrogeais sur l’application de l’accord de gouvernement portant sur les projets de prévention contre toute forme de discrimination, de préjugés, de racisme, d’islamophobie et d’antisémitisme au sein des écoles et des structures d’accueil pour jeunes. Dans votre réponse, vous nous disiez que la lutte contre les discriminations devait être une de nos principales préoccupations. Aujourd’hui, après les attentats de Paris qui ont coûté la vie à une vingtaine de personnes et qui ont également eu un certain impact dans notre pays, la préservation du vivre ensemble constitue un défi majeur pour l’ensemble des démocrates. Il importe de s’y atteler, sous peine de laisser la haine des exécutants et des inspirateurs de ces crimes se diffuser toujours davantage dans notre société. Ma question orale se focalise sur la discrimination à caractère ethnique. Outre les mesures à prendre en matière de lutte antiterroriste, il faut se donner les moyens de garantir que toutes les composantes de notre société y soient pleinement insérées. Chacun de nous, au travers de ses moyens, doit lutter pour que nous restions reliés, que nous puissions vivre ensemble en société. Dans cette optique, la lutte contre les discriminations revêt un caractère d’urgence absolue. Lors des travaux parlementaires de novembre, vous aviez dit : « La meilleure façon de combattre la discrimination est de collaborer avec la société civile et de lui donner l’opportunité de travailler de manière positive sur des projets de lutte contre le racisme, contre les préjugés et les autres types de discrimination ». Je vous rejoins totalement. Vous aviez évoqué, à cette occasion, la possibilité de mettre en place une campagne de sensibilisation sur la diversité à l’embauche dans les entreprises. Quel est l’état d’avancement de vos projets de lutte contre la discrimination au travail ? Quels contacts avez-vous pris avec la société civile pour ce qui est de la lutte contre la discrimination à l’embauche ? Disposez-vous d’éléments à nous communiquer en ce qui concerne le lancement de la campagne de sensibilisation ? Mme Bianca Debaets, secrétaire d’État.- Effectivement, il y a des éléments à vous communiquer sur la question, puisque, dans le cadre de la lutte contre le racisme au sein des entreprises, nous allons organiser un projet en collaboration avec les trois syndicats, la Confédération des syndicats chrétiens (CSC), la Fédération générale du travail de Belgique (FGTB) et la Centrale générale des syndicats libéraux de Belgique (CGSLB). Compte tenu de leur rôle de défenseurs des intérêts des travailleurs, les syndicats, avec leurs délégués, constituent un partenaire naturel en matière de mise en oeuvre de la politique de l’égalité des chances. Leur présence sur le terrain est essentielle pour garantir cette politique sur le lieu de travail et prendre part à la lutte contre le racisme et la discrimination. Ce projet vise à organiser et à mettre en oeuvre les activités suivantes : – une étude de la situation en matière de racisme et de discrimination sur le lieu de travail au niveau des entreprises bruxelloises ; – un examen des plans d’action relatifs à la lutte contre le racisme existant dans les entreprises bruxelloises ; – un rapport concernant l’étude et l’examen susmentionnés ; – l’organisation de tables rondes avec des organisations de la société civile, visant le développement et la mise en oeuvre d’un plan d’action contre le racisme et la discrimination sur le lieu de travail ; – la création d’un plan de communication avec sélection et justification des canaux et instruments choisis (affichage, publipostage par internet, médias sociaux…), suivi du développement et mise en oeuvre d’une campagne bilingue de sensibilisation ; – le développement d’un outil de travail pratique et accessible en matière de lutte contre le racisme, avec des « trucs et astuces » à utiliser concrètement dans la vie de tous les jours ; – une concertation avec Brussels Enterprises Commerce and Industry (BECI), afin de sensibiliser les employeurs dans leur mission de lutte contre la discrimination sur le lieu de travail. Mme Catherine Moureaux (PS).- Concernant l’examen des plans d’action, c’est-à-dire ce qui existe déjà, pouvez-vous nous expliquer l’articulation entre ce que vous demandez là et ce qui se fait en termes de plan de diversité dans les entreprises ? Au sujet du plan de communication, je ne suis pas sûre d’avoir bien compris. Qui va le développer ? Vous et les syndicats ? Ou bien cela se fera-t-il dans les entreprises ? Enfin, vous avez déjà entamé ce processus. Avez-vous une idée plus précise de son agenda ? Mme Bianca Debaets, secrétaire d’État.- Les plans d’action que nous demanderons aux entreprises pourront être des plans de diversité ou d’autres outils que les sociétés ont pu développer. En effet, certaines d’entre elles vont encore un peu plus loin que l’application de tels plans. Nous allons récolter tout ce qui existe en la matière dans les entreprises bruxelloises. La communication ne sera pas réalisée par notre administration, mais par un bureau externe qui n’a pas encore été choisi. Le projet doit encore se mettre en place. Enfin, en termes d’agenda, si tout va bien, le projet va débuter en juin ou en juillet.
Renforcer les coordinations sociales
Comment renforcer les coordinations sociales ? Tel est l’objet de mon interpellation à Céline Fremault, lors de la commission des affaires sociales de la Commission Communautaire Commune (CoCoM) du 22 avril… INTERPELLATION DE MME CATHERINE MOUREAUX À M. PASCAL SMET, MEMBRE DU COLLÈGE RÉUNI, COMPÉTENT POUR LA POLITIQUE D’AIDE AUX PERSONNES, LES PRESTATIONS FAMILIALES ET LE CONTRÔLE DES FILMS, ET À MME CÉLINE FREMAULT, MEMBRE DU COLLÈGE RÉUNI, COMPÉTENTE POUR LA POLITIQUE D’AIDE AUX PERSONNES, LES PRESTATIONS FAMILIALES ET LE CONTRÔLE DES FILMS, concernant « les coordinations sociales au sein des CPAS bruxellois » Mme Catherine Moureaux (PS).- À l’occasion des travaux budgétaires des Commissions réunies de la Santé et des Affaires sociales, et en particulier lors des débats relatifs à l’allocation de base (AB) 03 6 2 43.01 « subvention pour la coordination sociale au sein des CPAS », l’ensemble des groupes politiques se sont prononcés en faveur d’une majoration du soutien aux coordinations des CPAS. Les membres du Collège ont émis un avis allant dans le même sens. La loi organique de 1976, dans son article 62, entendait faire jouer aux CPAS un rôle moteur dans la mise en réseau locale. Les coordinations sociales jouent ce rôle. Par ailleurs, elles sont l’un des creusets les plus intéressants de l’évolution des relations entre l’institutionnel et le monde associatif. Elles permettent de décloisonner les pratiques et de favoriser la rencontre et le dialogue entre les opérateurs de première ligne au plan local. Pour mon groupe, c’est clairement au CPAS que doit revenir le rôle de coordinateur de la politique sociale au plan local, et donc le pilotage des coordinations sociales locales. Vos prédécesseurs ont commandité et reçu, en février 2014, les conclusions d’une étude sur la pratique des coordinations sociales par les CPAS bruxellois. Celle-ci émanait de l’Unité de recherche en ingénierie et action sociale (URIAS). La lecture des conclusions et des recommandations formulées est particulièrement édifiante. De nombreuses recommandations s’adressent aux CPAS et aux coordinateurs. Elles questionnent nombre de réflexes institutionnels du côté des CPAS et la question centrale de la relation entre le politique, l’administration et l’association. Elles invitent à plus de souplesse, d’écoute et de mise en réseau. Elles pointent aussi les bonnes pratiques existantes. Dans quelle mesure intégrez-vous dans votre réflexion les éléments de conclusion et les recommandations de l’étude ? Comptez-vous augmenter les moyens dévolus aux coordinations sociales au plus prochain ajustement en 2015, ou le cas échéant au budget 2016 ? Toujours en termes de moyens, comment vous situez-vous par rapport aux trois recommandations suivantes de l’étude ? La première recommandation stipule que l’organisation d’une coordination sociale demande au minimum un demi équivalent temps plein (ETP), voire deux ou trois ETP selon l’ampleur du travail à effectuer. Elle préconise également de tenir compte des compétences utiles aux coordinateurs, qui correspondent à un niveau universitaire. La deuxième recommandation est plus intéressante en termes d’affectation des moyens : la clé de répartition des moyens entre les coordinations devrait être modifiée, en tenant compte, par exemple, du nombre potentiel d’acteurs à coordonner et d’un lien minimal entre la subvention et les activités de coordination réellement menées, tout en évitant de tomber dans le piège d’une évaluation uniquement quantitative, qui prive les coordinations sociales débutantes de montants qui leur permettraient de commencer leur action. Troisième recommandation, il est nécessaire d’intégrer cette activité de manière structurelle dans les missions à mener par les différents intervenants, tant en termes de temps de travail libéré que de latitude d’action offerte pour les acteurs en présence. C’est toute la question de l’agrément et de la limitation des actions menées dans les agréments. En effet, la coordination nécessite l’implication des acteurs locaux, or les actions menées en réseau correspondent rarement stricto sensu au cadre précis d’agrément de ces acteurs, alors même qu’elles soutiennent le travail social agréé. C’est un pan qui est indirectement générateur de dépenses supplémentaires. Concernant la manière dont vous allez travailler dans le futur, allez-vous mettre cette question en chantier avec les CPAS et leurs coordinateurs ? Avez-vous prévu de les rencontrer, si c’est le cas ? Toujours en termes de moyens, comment vous situez-vous par rapport aux trois recommandations suivantes de l’étude ? La première recommandation stipule que l’organisation d’une coordination sociale demande au minimum un demi équivalent temps plein (ETP), voire deux ou trois ETP selon l’ampleur du travail à effectuer. Elle préconise également de tenir compte des compétences utiles aux coordinateurs, qui correspondent à un niveau universitaire. La deuxième recommandation est plus intéressante en termes d’affectation des moyens : la clé de répartition des moyens entre les coordinations devrait être modifiée, en tenant compte, par exemple, du nombre potentiel d’acteurs à coordonner et d’un lien minimal entre la subvention et les activités de coordination réellement menées, tout en évitant de tomber dans le piège d’une évaluation uniquement quantitative, qui prive les coordinations sociales débutantes de montants qui leur permettraient de commencer leur action. Troisième recommandation, il est nécessaire d’intégrer cette activité de manière structurelle dans les missions à mener par les différents intervenants, tant en termes de temps de travail libéré que de latitude d’action offerte pour les acteurs en présence. C’est toute la question de l’agrément et de la limitation des actions menées dans les agréments. En effet, la coordination nécessite l’implication des acteurs locaux, or les actions menées en réseau correspondent rarement stricto sensu au cadre précis d’agrément de ces acteurs, alors même qu’elles soutiennent le travail social agréé. C’est un pan qui est indirectement générateur de dépenses supplémentaires. Concernant la manière dont vous allez travailler dans le futur, allez-vous mettre cette question en chantier avec les CPAS et leurs coordinateurs ? Avez-vous prévu de les rencontrer, si c’est le cas ? Discussion M. Michel Colson (FDF).- Je vais tenter d’intervenir sans donner l’occasion à mon jeune collègue Alain Maron de me considérer comme un ancien combattant. (Sourires) Un peu d’histoire tout de même. J’ai découvert la coordination sociale lorsque M. Picqué était ministre communautaire, chargé de la tutelle sur les CPAS. Cela remonte à 1987. Je me
Difficultés des petites ASBL du secteur des arts plastiques
Ce 30 avril, en Commission, j’ai interrogé la Ministre de la Culture sur les difficultés des petites ASBL du secteur des arts plastiques. Mme Catherine Moureaux: « Le décret du 3 avril 2014 relatif au secteur des arts plastiques, qui intègre le design, la mode, les arts numériques et l’architecture, est entré en vigueur le 1er janvier 2015. Ce nouveau décret vise notamment la consécration et la consolidation du travail mené par les créateurs professionnels dans le champ des arts plastiques et l’élargissement de l’accès des oeuvres au public. De plus, il favorise la transparence et l’objectivation des missions confiées aux opérateurs et des subventions qui en découlent. C’est une excellente chose pour le secteur. En janvier dernier, le groupe PS vous avait interpellée sur la mise en oeuvre du décret et ses différents arrêtés d’exécution. Vous aviez mentionné un courrier adressé aux opérateurs qui détaillait les principales adaptations liées à l’entrée en vigueur. Sur la base de cette communication, j’ai été interpellée par de petites ASBL inquiètes pour le renouvellement de leur convention. Une petite association est une association qui, à la date de clôture de l’exercice social, n’atteint aucun ou un seul des trois critères suivants: cinq travailleurs en moyenne annuelle exprimés en ETP, 250 000 euros pour le total des recettes autres qu’exceptionnelles, à l’exclusion de la TVA, un million d’euros pour le total du bilan. Ces petites ASBL peuvent tenir une comptabilité simplifiée de type débit/crédit. Le décret prévoit entre autres l’obligation pour le demandeur d’établir un compte de résultats et une situation bilantaire, conformément aux principes et règles usuelles de la comptabilité en partie double. Par ailleurs, le texte précise les délais à respecter pour renouveler les conventions. Madame la Ministre, si je me réjouis qu’un cadre réglementaire précise les règles et les conditions d’octroi de subventions, ce décret va beaucoup plus loin sur les exigences comptables que la loi sur les ASBL. Cette nouvelle donne peut, pour beaucoup de ces petites associations, engendrer une série de difficultés dans leur gestion quotidienne, dont des frais supplémentaires non négligeables pour l’engagement d’un comptable ou encore une complexification administrative. Pourriez-vous m’indiquer combien de petites ASBL étaient conventionnées avant l’entrée en vigueur du nouveau décret? Combien de ces associations ont-elles demandé un renouvellement de leur convention? Avez-vous été interpellée sur la question des exigences comptables? Dans l’affirmative, quelle réponse y avez-vous apportée? Des mesures particulières pour accompagner les associations qui rencontreraient des difficultés sont-elles organisées par l’administration? L’organisation d’une permanence comptable est-elle envisagée afin d’épauler le travail des opérateurs dans le processus d’intégration au nouveau décret? » Mme la Ministre: « Si la comptabilité des petites ASBL permet en théorie de vérifier le respect des critères de recettes annuelles inférieures à 312 500 euros et d’un total du patrimoine inférieur 1 249 500 euros, elle ne permet cependant pas de connaître le nombre exact de travailleurs occupés, à moins de s’essayer à une estimation sur la base du montant des rémunérations communiquées par les ASBL. L’administration estime que dans le secteur des arts plastiques, deux tiers des 54 opérateurs conventionnés peuvent être considérés comme de petites ASBL, au sens de la loi comptable. L’ensemble des opérateurs du secteur des arts plastiques, qu’ils soient de taille plus ou moins importante, sollicitent, en règle générale, un renouvellement de leur convention au terme de celle-ci. Cette demande intervient au plus tard à la fin du premier trimestre de la dernière année couverte par la convention. Cette année, 21 opérateurs du secteur des arts plastiques sont concernés par l’introduction d’une demande de renouvellement, dont deux tiers de petites ASBL. L’administration a été interpellée par quelques petites ASBL du secteur des arts plastiques et a répondu à leurs questions. Par ailleurs, des outils en ligne ont été mis en place en vue de soutenir ces opérateurs conventionnés. L’ensemble de la documentation nécessaire à la tenue d’une comptabilité en partie double est publié sur le site culture.be, dans les chapitres «chantiers/dico/harmonisation des normes comptables». Un modèle de plan comptable minimum normalisé s’y trouve également. En ce qui concerne les mesures particulières, il faut d’abord souligner que les exigences légales déjà imposées aux petites ASBL pour la tenue et la remise de leurs comptes annuels sont assez similaires à une comptabilité en partie double. On peut penser, par exemple, aux annexes imposées aux modèles «état des recettes et des dépenses» contenant notamment un état du patrimoine. Selon un rapport 2012 intitulé «Dix ans de la loi ASBL, bilan et perspectives» de l’Institut Émile Vandervelde, «dès le moment où une ASBL devient employeur avec au moins un travailleur, il est préférable d’avoir une comptabilité en partie double». En ce qui concerne les mesures particulières adoptées par l’administration, la direction des Arts plastiques est évidemment à l’écoute des questions et problèmes particuliers exprimés par les opérateurs et s’emploie à leur répondre en faisant appel, si besoin, au Centre d’expertise juridique et au service d’inspection. L’article 60 du décret sur les arts plastiques confirme ce rôle de support de l’administration et l’organisation d’une permanence. L’organisation d’une permanence comptable n’est pas encore envisagée pour des questions de ressources humaines. Cela dit, cette idée ne me semble pas dénuée d’intérêt; j’en parlerai avec l’administration. » Mme Catherine Moureaux: « Je retiens, Madame la Ministre, que vous confirmez le rôle de support nécessaire de l’administration et que votre direction est à l’écoute. Je ne suis pas sûre d’avoir compris la raison pour laquelle le Centre d’expertise juridique doit être contacté, mais peut-être allez-vous me l’expliquer. Je suis surtout frappée par une disposition qui, ne vous méprenez pas, me semble judicieuse. Il s’agissait de s’assurer que l’on ne pouvait pas empêcher certaines associations – en particulier celles dont les pratiques en matière de comptabilité pourraient être qualifiées d’ancestrales – de continuer à fonctionner. Ces associations doivent pouvoir être aidées. Je retiens aussi le nombre d’associations concernées. Depuis que j’ai rédigé ma question, il m’a été confirmé que les associations du secteur des arts de la scène étaient aussi concernées par ce problème. Je me demande si